Réalisateur : Seth Larney
Année de Sortie : 2020
Origine : Australie
Genre : Voyage Dans Le Temps
Durée : 1h54
Thibaud Savignol : 4/10
Futur Hypothéqué
Difficile aujourd’hui de proposer quelque chose de neuf en s’attaquant au thème essoré du voyage dans le temps et rester cohérent face à ses nombreux paradoxes. Photographe de plateau en 2005 sur le troisième volet de la prélogie Star Wars, Seth Larney dirige ici son première long-métrage. Réputé pour son travail de superviseur des effets visuels, il souhaite livrer une œuvre riche visuellement, où son savoir faire sera exploité sur le moindre centimètre carré de pellicule (ou de disque dur, 2020 oblige). En 2067 la Terre agonise, la vie végétale s’est éteinte, transformant l’oxygène en une denrée rare. Face à ce compte à rebours mortel, des scientifiques développent une technologie pour se déplacer dans le temps, et reçoivent un message de 400 ans dans le futur : «Envoyez Ethan Whyte». Ouvrier dont la femme est souffrante, mais également fils d’un chercheur disparu, Ethan Whyte est envoyé dans le futur, seul espoir d’une humanité suffocante.
Malgré des moyens limités, Larney parvient à illustrer son propos lors de sa phase d’exposition, rendant crédible ce monde post-apocalyptique. Ici les États sont encore debout, la survie du plus fort n’est pas encore d’actualité, mais pour combien de temps ? Choisir cet entre deux est pertinent pour construire son suspense. L’Humanité n’a pas encore totalement sombré, peut être bientôt, mais une dernière chance s’offre à elle. Sorte d’écho amplifié à notre triste réalité, où l’espérance de vie de la Terre et de ses habitants se réduit comme peau de chagrin, 2067 se pose en cri d’alarme. Dépeignant une humanité à bout de souffle, littéralement (l’oxygène s’est raréfié), il rend crédible un univers pas si lointain grâce à sa direction artistique subtilement dosée : quelques inventions et gadgets, une esthétique cyberpunk, mais sans dénaturer un futur proche rendu plausible. Entre sa scène d’introduction au cœur de mines irrespirables, son projet scientifique fou et ses rues malfamées, le projet démarrait avec les meilleures intentions du monde.
Mais malgré une entrée en matière réussie, le bât blesse rapidement dès son deuxième acte. Ethan arrive 400 ans dans le futur, et à partir de là le film commence à tourner un rond, se réduisant à un huit clos répétitif et fauché. La première partie fut en quelque sorte une poudre aux yeux pour faire oublier la faiblesse de son budget. Évoluant dans un décor quasi unique, le personnage principal, bientôt rejoint par un comparse, découvre les pistes qui le relient à son passé et à son potentiel futur. Assez vite éventé, fabriquant une tension artificielle qui peine à convaincre, le long-métrage s’étire inutilement en longueur. On sent que Larney veut explorer toutes les pistes qui s’offrent à lui au détriment d’un rythme en dent de scie, et une durée abusive de quasi deux heures. Écueil classique d’un premier film où son réalisateur veut faire rentrer le plus d’idées visuelles et thématiques possibles, ne sachant pas si il aura un jour la chance de revenir derrière la caméra. Une ambition qui se comprend, mais dont le script ne justifie pas le trop plein.
N’évitant pas les problèmes liés aux paradoxes temporels, inhérents à ce genre de projet et sûrement insolubles de par leur nature, 2067 retombe in-extremis sur ses pattes et parvient à conclure son récit avec un certain panache. Les dilemmes moraux ont été intelligemment mis en place en vue d’un climax apte à nous faire ressentir une certaine émotion. Fable écologique et morale derrière un récit science-fictionnel alarmant, une sensation d’inachevé persiste après la vision du film. Les promesses ne sont pas tenues sur la durée en dépit d’un cachet visuel pas inintéressant. On attend le prochain projet de Larney intrigué. S’il parvient à gommer ses problèmes d’écriture et de rythme, il pourrait amener une proposition de SF autre, différente du tout venant actuel.