Réalisateur : Jaume Balaguero
Année de Sortie : 2014
Origine : Espagne
Genre : Horreur Maritime
Durée : 1h36
Thibaud Savignol : 2/10
Apocalypse Eco+
Mises en chantier en parallèle, ce quatrième opus de la saga REC ne dépendait donc pas des résultats mitigés du troisième film. Ce dernier engrangea une petite dizaine de millions de dollars au box office mondial, loin des 33 millions du premier opus. Le changement de format, et surtout de ton n’y est sans doute pas étranger. Après deux épisodes intégralement tournée en found-footage, participant à relancer cette mouvance aux côtés du mal-aimé Paranormal Activity, les réalisateurs ont choisi d’abandonner le procédé au profit d’un filmage plus conventionnel. Alors que Plaza rendait hommage à tout un pan du splatter et du film gore avec son Genesis, tiraillé entre impératifs de la saga et volonté de s’en émanciper (l’intrigue raccroche presque artificiellement la trame narrative principale pour justifier péniblement le carnage orchestré), Balaguero s’inscrit dans la droite lignée du second opus. En effet, les péripéties de cet ultime volet commencent là où se terminaient celles du second. Malheureusement, l’Apocalypse annoncée lors de la pré-production a disparu des affiches, laissant apparaître un sobre REC 4. Sûrement un moyen de se débarrasser de l’aura gênante de l’échec du précédent volet (à tort), pour recoller sobrement aux origines de la saga.
L’ouverture voit un escadron d’élite (encore un), prendre d’assaut le désormais célèbre immeuble de Barcelone en vue de récupérer la journaliste Angela Vidal. Elle se réveille au cœur d’un laboratoire où des expériences sont menées sur elles. Les scientifiques font partie du projet qui a vu émerger l’horrible Tristana Medeiros et savent donc à quelle menace la jeune femme a été confrontée. Déclarée saine, elle peut désormais vaquer en liberté à ses occupations à bord du bateau. Toujours respectueux de l’unité de lieu (mais beaucoup moins de temps), REC 4 déplace son action en pleine mer, fidèle au principe de claustration de la saga. Sans besoin aucun de justifier le retour à un filmage traditionnel (le troisième volet s’en était chargé lors de son introduction), Balaguero se complaît pourtant à singer maladroitement les tics du found-footage, sans embrasser pour autant son terrifiant potentiel.
Contrairement à Plaza qui jouissait pleinement du retour à une mise en scène classique, notamment grâce à de très nombreux mouvements de caméra chorégraphiés (grues, travelling), son ancien collaborateur apparaît dénué de la moindre imagination. Il tente vainement de récréer la sensation d’étouffement du film originel, à travers ce choix fainéant d’une caméra à l’épaule, tremblotante, rendant souvent l’action confuse voire illisible. Sans parler d’un étalonnage sombre et monochrome, aux couleurs délavées, où la nuit noire et pluvieuse achève une esthétique bien fade et sans idée.
Scénaristiquement, le quatrième opus marque le pas. Une défaillance qui apparaissait pourtant dès le second opus. Car la force de l’opus originel venait sûrement de ses non-dits, de cette menace inconnue, tapie dans l’ombre, laissant augurer des ténèbres sans fonds au cœur de la grande ville, blottis dans un grenier en apparence banale. Dès sa suite deux ans plus tard les explications abondaient, faisant dériver la saga vers le catholique porn habituel, où derrière la science se tapissait des intentions religieuses malveillantes. Le mésestimé Genesis doit en partie sa réussite à s’en être tenu au minimum syndical pour rattacher les wagons à la série, sans en faire des tonnes : un infecté relié aux événements du premier (l’oncle) et le personnage d’un prêtre pour assurer la continuité sacrée.
Mais REC 4 plonge la tête la première dans l’océan de sur-explications, cherchant à rassembler toutes les pièces du puzzle pour l’assembler lors d’un dernier métrage censé apporter toutes les réponses. Il dérive dès lors vers la pure série Z, à base d’expérimentations mi-scientifiques mi-divines, et le choix des titres interroge ; l’Apocalypse n’a pas vraiment lieu (ça manque de monde sur le bateau quand même) et on assiste plutôt à la création, et donc à la Genèse, de ce satané virus.
A la lourdeur de l’écriture et à une patine visuelle affreuse s’ajoute le poids d’une référence qui infuse de son concept tout le long-métrage. Impossible en effet de ne pas voir à travers ce quatrième volet une relecture bourrine du The Thing de Carpenter. Une fois les hostilités lancées, et s’ajoutant à la menace des infectés, se greffe une chasse paranoïaque pour savoir qui est infecté par le parasite originel. La journaliste, rapidement disculpée, entretiendra pourtant tout du long une ambiguïté qui ne sera levée que lors du dernier acte. Au milieu de ce joyeux bordel entre forces armées et scientifiques (The Thing encore et toujours), chacun suspecte son voisin d’être contaminé, entraînant forcément au sein d’un lieu confiné, les pires réactions. Si Balaguero s’était limité à cet aspect, proposant un tour de montagne russe aussi suffocant que son premier (et meilleur) volet, peut-être REC 4 aurait pu se poser en série B musclée et efface. En l’état il n’en est rien, et la saga se termine par un terrible naufrage, devenant par moment sa propre caricature. Finalement, peut-être que tout avait été déjà dit en 2007.