Réalisateur : Zachary Donohue
Année de Sortie : 2013
Origine : États-Unis
Genre : Thriller 2.0
Durée : 1h21
Le Roy du Bis : 6/10
Thibaud Savignol : 5/10
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On ne lâche pas la poule aux œufs d’or si facilement. Le Found footage se décline désormais sous tous les genre, étant le principal pourvoyeur du cinéma d’horreur souvent ciblé par les débutants. C’est assez logique finalement puisque la peur, tout comme le rire, est une émotion qui se prête parfaitement à la captation sur le vif, tel un cruel bêtisier. Et puis il n’y a rien de plus effrayant que de filmer un couloir sombre ou une forêt plongée dans un silence de mort, avant que n’intervienne le jump-scare tant redouté. Par ailleurs ce type de film, dont l’argument repose sur le fait que son contenu aurait été retrouvé après la disparition de ses auteurs, a le don d’alimenter la célèbre légende urbaine des snuffs movies que l’on s’échangeait sous le manteau, une idée que reprendront d’ailleurs à leur compte les anthologies V/H/S avec plus ou moins de succès.
Le Found footage a donc prospéré durant les années 2010, devenant un gigantesque entonnoir dévolu au 7ème art (science-fiction, super-héros, comédie, thriller, zombies, vampires,docu-fiction) avant de disparaître brusquement des radars. Beaucoup de bruit pour rien diront les mauvaises langues, mais pendant que certains se vautraient lamentablement dans la fange de ce nouvel Eldorado avec la seule motivation de se faire un nom, d’autres tentaient d’en révolutionner le procédé en proposant de nouvelles alternatives de mise en scène comme le Screen Reality. Une sous-catégorie qui se limiterait au cadre d’un écran d’ordinateur, et si officiellement Unfriended en serait bien l’initiateur, il n’est néanmoins pas le premier à l’avoir employé. Deux ans auparavant sortait The Den, lui-même considérablement inspiré par le faux documentaire Megan is Missing réalisé en 2007 mais finalement sorti en 2011.
Le sujet aura le mérite de parler aux éternels adolescents s’étant déjà rendus sur les tchats type Coco, pour troller et piéger des quarantenaires désireux de se soulager à la webcam avec des godemichés géants. La différence, c’est que si les imbéciles dans notre genre y allait pour se marrer, Elizabeth de son côté le fait très sérieusement dans le cadre d’une thèse sociologique. Et pour cause, ce phénomène devenu viral est rapidement devenu le berceau des catfish, sociopathes, pédobear, exhibitionnistes, sexe-addicts et autres pervers en tout genre, à tel point que les individus plus mesurés sont finalement devenus une minorité. Si l’intention derrière la création d’une messagerie de discussion instantanée était louable à l’époque, force est de constater qu’elle a comme trop souvent été pervertie par la connerie humaine.
La majeur partie du film se suit donc par le biais d’une fenêtre informatique, animée par les différentes interactions de l’héroïne nous immergeant au cœur de sa sphère intime et privée. Si le concept aurait pu s’avérer assez casse-gueule, le fait est qu’il permet de renforcer le sentiment de promiscuité ainsi que la tension. Que ce soit au détour d’un jump-scare amusant dans une chambre d’enfant ou bien par le biais d’une simple photo qui aura le don d’éveiller notre suspicion, Elizabeth va accidentellement se retrouver témoin d’un meurtre en direct au sein d’un salon privé, normalement destiné à de riches contributeurs désireux de se rincer l’œil. Faute de donation, l’organisation responsable de ce commerce d’êtres humains va pister son adresse IP afin de la retrouver.
Dommage, le réalisateur n’assume pas pleinement ce choix de mise en scène, ce qui aurait évidemment impliquer de respecter totalement la diégèse. À défaut on repassera à un format plus traditionnel caméra à l’épaule, en plus de devoir supporter quelques situations un brin énervantes, comme l’inaction des autorités ou cette tendance évidente à vouloir tout exagérer, au point de filmer quoi qu’il en coûte quitte à se mettre soi-même en danger. Une tare évidemment commune à tous les films du genre, sans quoi nous ne saurions probablement jamais satisfaits. Cette histoire qui ressemble à un véritable fait divers est d’ailleurs inspirée d’un cas qui défraya la chronique. En 2010, la vidéo d’un meurtre diffusé sur Chatroulette avait suscité le buzz sur internet entre indignations, fantasmes, et délires complotistes. Hors il s’agissait en réalité d’un véhicule promotionnel destiné à une nouvelle chaîne TV espagnole, ce qui n’est en revanche pas le cas ici.
Zachary Donohue parvient néanmoins à nous impliquer durant cette traque online, et à mettre en lumière les dangers du World Wild Web que nous avons habituellement coutume de négliger, derrière l’anonymat et la sécrétine de notre adresse IP. The Den a donc le mérite d’apporter une vraie réflexion sur notre utilisation irraisonnée du réseau, les risques encourus par le partage d’informations privé et notamment les dérives criminelles du type harcèlement numérique, que nos actes peuvent parfois engendrer par voyeurisme. La prochaine fois, vous y repenserez donc à deux fois avant de piéger quelqu’un sur ce genre de tchat, parce que vous pourriez bien finir par tomber sur quelqu’un de familier ou pire, vous pourriez même atterrir de l’autre côté de l’écran avec un Jéroboam dans le fion.