Réalisateur : Xavier Gens
Année de Sortie : 2011
Origine : États-Unis / Canada / France / Allemagne
Genre : Science-Fiction Souterraine
Durée : 2h02
Le Roy du Bis : 7/10
Thibaud Savignol : 4/10
La Fin des Haricots
Finalement, le calendrier maya aura donné raison aux prédictions des Cassandres et autres survivalistes en herbe, qui espéraient enfin pouvoir inaugurer leur nouvel abri anti-nucléaire. Peu de temps avant la date fatidique, de nombreux cinéastes se sont donc essayés au registre du film post-apocalyptique, le plus célèbre d’entre eux étant bien évidemment le 2012 de Rolland Emmerich, qui remettait les compteurs de l’humanité à zéro avec des explosions et tsunamis d’ampleurs cosmique. The Divide se situerait en revanche dans la mouvance des films post 11 septembre, avec sa destruction du monde provoquée par ce que l’on imagine être un conflit géopolitique, même si rien n’est explicité (les Arabes et Nord-Coréens sont mentionnés, tout au plus).
En effet, le film nous enferme très rapidement au sein d’un abri dans lequel les dissensions entre survivants ne vont pas mettre longtemps à se manifester, en raison de la promiscuité, des troubles de la personnalité, du manque d’eau et surtout de haricots. Entre une petite frappe qui se transforme en tortionnaire zélé, un vieux réac’ raciste qui planque toutes les denrées, une nymphette qui se fait appeler Marylin, et un punk à chien qui se transforme en monstre homicidaire, l’avenir de l’humanité semble visiblement entre de bonnes mains. On en attendait pas moins de Xavier Gens, responsable de Frontières, survival mettant aux prises des citadins de la banlieue avec des collabos nazis de la France profonde, puis de Hitman, adaptation du jeu vidéo éponyme, le réalisateur n’étant pas réputé pour faire dans le social. Face à la frivolité des producteurs, il n’a pas eu d’autre choix que de s’exiler aux Etats Unis afin de pouvoir monter son dernier projet, comme d’autres de ses confrères français (Christophe Gans, Alexandre Bustillo & Julien Maury).
Débarrassé de toute contrainte restrictive et morale mais pas financière, le cinéaste choisit d’investir le sous-sol crasseux d’un immeuble pour livrer un huit clos étouffant, quitte à s’amuser de la détresse de ses protagonistes qu’il filme rarement à leur avantage (la nymphette servant d’objet sexuel, l’avocat traité comme un vulgaire roquet, la lente déshumanisation de deux tyrans atteints de la gale). A l’instar d’un David Fincher, le réalisateur cherche à reproduire cette photographie assez sombre teintée de clairs obscurs, afin d’accentuer la noirceur et l’abject qui fascinent autant qu’ils répugnent au plus haut point. Il nous expose aux pires facettes de l’humanité, lorsque l’individu est ramené à l’état sauvage. L’individualisme forcené, le racisme ordinaire, la lâcheté, les sévices et châtiments corporels, les humiliations, le sadisme et même le viol, tout y est abordé. Pourtant l’intérêt réside moins dans ce sentiment de dégoût que dans la psychologie de ses personnages, plutôt complexes et très bien interprétés (mention spéciale à Michael Biehn), puisqu’ils se définiront avant tout par leurs comportements et leurs actes, face à des situations de survie qui laissent souvent peu de place à l’héroïsme ou à l’empathie.
La cohabitation forcée, le manque d’intimité (les odeurs dues à l’incontinence et le manque d’hygiène corporelle), et le régime Dukan instauré par le maître des lieux ne sera pas au goût de certains, faisant rapidement chanceler l’unité. Malgré les limites que cet exercice lui impose, Xavier Gens sait poser une ambiance et exploiter son environnement. Il le filme sous différents axes et angles de vue afin de renforcer le sentiment de claustration et de promiscuité, tout en insufflant un climat délétère et une atmosphère viciée qui nous placent d’emblée dans une situation assez inconfortable. En revanche, il ne peut éviter quelques ficelles scénaristiques et écueils larmoyants, d’ailleurs renforcés par une partition qui fout le bourdon. Le ton résolument pessimiste ne laisse finalement que peu d’espoir sur la capacité de l’être humain à se rassembler et à s’organiser sans tomber dans les extrêmes. Le tort dans tout cela, c’est que l’on ressentira moins d’empathie à leur égard et la mort semblera mille fois préférable à leur sort. Bref, l’enfer c’est encore et toujours les autres.