Réalisateurs : Adam Wingard, Simon Barrett, Gareth Evans, Jason Eisener, Timo Tjahjanto, Eduardo Sanchez, Gregg Hale
Année de Sortie : 2013
Origine : États-Unis / Canada / Indonésie
Genre : Compilation Sketchs Found Footage
Durée : 1h36
Le Roy du Bis : 7/10
Thibaud Savignol : 6/10
Le Collectionneur
Les campagnes marketing ont la fâcheuse tendance à faire beaucoup trop de bruit pour rien dès qu’il s’agit de promouvoir un nouveau Found footage. V/H/S ne faisait malheureusement pas exception et ne tenait pas toutes ses promesses. Il avait pour lui son concept original quelque peu hybride, qui nous permettait de découvrir un petit corpus de «snuffs» movies, ou du moins quelques vidéos interdites que l’on peut parfois retrouver sur des sites interpasnet pour satisfaire notre curiosité morbide. Fort d’une richesse thématique portant sur un trafic interlope de cassettes que l’on s’échangerait sous le manteau, ses réalisateurs n’avait pourtant qu’exploiter maladroitement le filon. Ces derniers peinaient à se démarquer de la mouvance du genre, si ce n’est que le film en constituait la quintessence avec ce que cela implique de fulgurances et de tares handicapante. Ses créateurs semblent néanmoins avoir tiré les leçons et enseignements de cet «échec» relatif au vu de sa popularité sur les réseaux sociaux et sites de téléchargements. Les rênes de ce nouveau projet ont donc été confiés à d’authentiques artisans et des nouveaux talents, rassurant le spectateur quant à la disparité des sketchs.
On retrouve donc des grands noms tels que Gareth Evans (The Raid 1 et 2) en binôme avec Timo Tjahjanto, mais également Eduardo Sanchez père fondateur du genre avec Le Projet Blair Witch. La crème de la production indépendante pourrait-on dire si on excepte la présence du taulier Adam Wingard (You’re Next), à qui l’on devait le fil narratif faiblard du premier corpus et qui sera parvenu à faire carrière à Hollywood en disant oui à tout (Godzilla Vs Kong). On ne sera donc pas surpris si la première histoire s’avère être un véritable pétard mouillé, à l’image du reste de sa filmographie, interprétant lui-même le rôle de cet accidenté qui se fait greffer une caméra à la place de l’œil. Si cet outil lui permet de voir des gens qui sont morts comme dans Sixième Sens, elle ne lui donne néanmoins pas une vision très originale de son dispositif de mise en scène. Il se contente ainsi d’aligner une galerie de fantômes assez random, genre réunion de famille avec une petite fille, un gros tout nu et quelques âmes damnées, vouée à nous flanquer des jump scares racoleurs digne d’un Grave Encounters au rabais, qui à trop vouloir en donner finira par lasser et avoir l’effet inverse que celui escompté.
Le fil narratif confié à Simon Barret n’est pas plus passionnant que dans le précédent volet, puisqu’il est surtout prétexte à regarder le contenu des cassettes plus qu’à mener une véritable intrigue, malgré son duo d’enquêteurs à la recherche d’un adolescent disparu. Les choses commencent même à se gâter sérieusement après le deuxième segment et sa virée de vététiste dans les bois filmée en go-pro, qui prend des airs d’épidémie zombie en temps réel. Un court-métrage qui tend allègrement vers la parodie gore rigolote pour ne pas dire potache, mais qui aura au moins le mérite de ne souffrir d’aucun temps mort malgré la trahison de sa diégèse, une autre source vidéo étant présente pour couvrir les événements.
La surprise viendra finalement de Safe Heaven, où l’on suit une équipe de reporters au cœur d’un massacre digne du temple solaire : d’actes pédophiles à une ambiance mortifère à vous refiler des sueurs froides, jusqu’à la stupeur lorsque les protagonistes sont frappés d’une illumination et se mettent à s’entre-tuer dans un vacarme assourdissant, qui va prendre une dimension apocalyptique. Un déchaînement d’exécutions sauvages et de suicides assistés extrêmement gores, où la chevrotine éclate les corps à bout portant libérant des flots de sang. Un cauchemar orgiaque qui ne se limite d’aucune contrainte technique ou éthique pour asséner de violents coups de butoir en pleine tête du spectateur. Les curseurs de l’horreur sont poussés vers les cymes d’une anthologie qui tient enfin une bonne histoire. Tant et si bien qu’il devient même difficile de passer derrière.
C’est pourtant la mission qui incombe à Jason Eisener (Hobo with a Shotgun), qui s’en tire avec les honneurs avec cette fête de lycéens qui va dégénérer lorsqu’une soucoupe volante atterrit à proximité. Classique mais efficace que cette invasion venue d’ailleurs, captée par une caméra fixée au collier d’un chien qui finira emporter dans un rayon tracteur. Si ce recueil s’avère déjà plus qualitatif que le précédent, on ne peut néanmoins pas s’empêcher de s’interroger sur l’intérêt de numériser des films tournés en numérique pour les convertir ensuite au format cassette, si ce n’est le pure délire fétichiste d’un collectionneur qui s’amuserait à dégrader volontairement la qualité de l’image par de nombreux glitchs visuels et sonores afin d’en renforcer l’aspect nostalgique. Comme son prédécesseur, V/H/S/ 2 aura donc surtout le même effet que ces flux ininterrompus de vidéos que l’on retrouve sur les réseaux sociaux, une sorte de Tik Tok pour dégénérés mentaux que l’on regarde durant les pauses caca au boulot.