[Critique] – Bone Sickness


Bone Sickness affiche Film

Réalisateur : Brian Paulin

Année de Sortie : 2004

Origine : États-Unis

Genre : Zombies Fulciens

Durée : 1h38

Le Roy du Bis : 7/10
Thibaud Savignol : 7/10


Manger ses morts


La maladie du zombie-flick s’exprime à travers ses différentes mues. Des origines vaudou au consumérisme Romerien, le mythe s’est largement propagé et métastasé : qu’il prenne sa source d’un sortilège, d’un pouvoir occulte, d’une emprise démoniaque ou bien d’un virus anthropophage. Mais ses différentes représentations souffrent également des limites narratives que le genre pourvoit (récit de survivance, état de siège), et d’intrigues parfois réduites à peau de chagrin. La puissance évocatrice du mort-vivant se suffit néanmoins à elle-même, en nous renvoyant à notre propre condition de mortel. C’est d’ailleurs cette hantise qui innervait le cinéma de Lucio Fulci, fervent croyant en la vie après la mort. Ses films d’horreur très atmosphériques cherchaient à sonder cet au-delà que ses personnages finissaient tôt ou tard par rencontrer.

Brian Paulin lui, et comme d’autres de ses contemporains, est un reproducteur américanisé de ce courant du bis transalpin. Ses influences fulciennes se résument donc à la pourriture des corps, ainsi qu’aux effets d’éclairage, de synthétiseur et de brume. Son enfer à lui se traduit par une maladie qui ronge les os de son héros. Pour retarder l’échéance, son meilleur ami légiste (interprété par le réalisateur lui-même) va alors juger bon de le nourrir avec des restes de cadavres putréfiés. Mais les morts ne supportant pas que l’on puisse toucher à leur garde-manger, vont alors ressortir de terre pour s’en prendre aux vivants.

On ne mange pas seulement ses morts dans Bone Sickness, on avale, on régurgite et on chie des vers. Le cannibalisme y est abordé sans aucun tabou. À l’instar de Todd Sheets, Olaf Ittenbach ou Andreas Schnaas, Brian Paulin est un maquilleur-concepteur d’effets spéciaux très talentueux, dont l’appétence pour les viscères, les meurtres brutaux et les chaires suppliciées n’est plus à prouver. L’ensemble de sa filmographie l’atteste. En revanche, ce dernier s’avère déjà moins à l’aise dans le travail de la mise en scène, ne s’embarrassant d’aucune contrainte, mouvement ou plan qu’il jugerait trop contraignant.

Bone Sickness Critique Film Gore

Afin de composer un décor de cimetière sinistre et oppressant, le cinéaste se limite à l’utilisation très approximative d’un projecteur de couleur vert, nimbé d’un brouillard occulte. Lorsque les morts se mettent alors à sortir de terre, le tableau nous renvoie au réveil des templiers d’Amando de Ossorio, même si le filmage en caméra DV limite considérablement la portée. Si certaines séquences oniriques sortent du lot (ce montage érotique alterné entre les courbes d’une blonde plantureuse et les ébats langoureux de deux squelettes purulents), l’intérêt réside d’avantage dans sa mécanique de prédation. Il faudra néanmoins supporter une longue et soporifique situation d’exposition, ce que la voluptueuse poitrine de l’actrice Darya Zabinski saura soulager.

Passé son indolente première heure, l’enfer se déchaîne enfin pour ne plus jamais s’arrêter. Le réalisateur se met alors à appliquer la règle du «More is Never Enough» si chère à Stuart Gordon, convoquant un bestiaire fantastique de zombies voraces, de squelettes ambulants, de goules sauvages et de gobelins démoniaques au nez crochu. Délesté du poids d’un héritage un peu trop lourd à porter (Romero, Fulci, Savini sont clairement ses maîtres de prédilection), Brian Paulin se complaît alors dans une orgie macabre, générant un chaos apocalyptique et sanglant. Les corps sont éviscérés, les visages déchiquetés, tandis que les têtes et les corps se mettent à exploser sous l’effet des déflagrations du SWAT. Les morts haïssent les vivants, et ces derniers le leur rendent bien.

Face à cette profusion d’effets gores, le film a mis pas moins de deux ans à se concrétiser avec un budget rachitique de 3000 $, beaucoup d’huile de coude, de bénévolat et de système D. Certains trucages brillent par leur ingéniosité. Brian Paulin ne se refuse rien, allant jusqu’à martyriser son acteur principal (il lui a notamment fait manger des vers vivants), que l’on verra soumis au terrible joug d’une mort lente, cruelle et particulièrement abjecte. Certes, la fin du monde esquissée dans l’épilogue se limite à un parking et une série de plans volés en extérieur, mais un énorme effort a été fait pour occasionner le plus grand carnage possible (tôles froissées, fusillades et corps dépoitraillés, volute de flammes et explosions goregasmiques). Les nombreux bêtisiers du DVD témoignent d’une ambiance de travail fun et décomplexée (le livreur de pizza attaqué par des goules sauvages), et ce malgré quelques accidents corporels à déplorer, heureusement sans réelle gravité.

Pour une fois, le terme «extrême» employé par Alex Visani afin de traduire l’expérience de visionnage n’était pas galvaudé. Le making of révèle également comment certaines séquences ont atterri dans le montage final comme celle du chien dévorant un crâne. En réalité, il s’agissait d’une simple blague potache partie d’un jeu de balle entre acteurs et techniciens qui se renvoyaient la tête d’un cadavre. Inédit chez nous, Bone Sickness se dévoile dans sa version Unrated chez Spasmo Video. Le film est d’ailleurs sous-titré en français pour les non-polyglottes. S’il n’est pas distribué par Uncut Movie, les amateurs auraient pourtant tort de faire la fine bouche, tant il s’agit d’un des films les plus trashs et généreux de l’éditeur italien.

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