Réalisateurs : Timo Rose et Andreas Schnaas
Année de Sortie : 2010
Origine : Allemagne
Genre : Gore
Durée : 1h15
Le Roy du Bis : 6/10
Thibaud Savignol : 2/10
Caca Nerveux
Plus de 10 ans après la sortie d’un troisième volet comme magnum opus de la saga, le retour de l’iconique Karl the Butcher se faisait attendre. Andreas Schnaas rempile pour un quatrième opus, accompagné cette fois par Timo Rose, l’étoile montante du cinéma gore underground allemand des années 2000. Bien que Schnaas apparaisse au casting, à l’écriture et à la réalisation, on sent que ce projet n’est plus vraiment le sien. Au sommet de son art à l’aube des années 2000 entre un Violent Shit 3 terminale, un Demonium comme première expérience vraiment professionnelle et un Nikos the Impaler réjouissant, le bonhomme se fait désormais plus rare. La collaboration entre les deux réalisateurs commence l’année précédente avec Unrated, et se poursuit donc en 2010 avec ce Karl the Butcher vs Axe. Alors que nos sociétés se sont effondrées grâce à de jolies cinématiques PS2, le monde est à la merci de gangs sanguinaires, composées de 3 à 5 membres maximum, qui s’affrontent pour étendre leurs territoires. Au milieu de ce joyeux bordel, Karl le boucher revient des enfers pour affronter un nouveau tueur sanguinaire en la personne de Axe.
Trop ambitieux au regard du budget que l’on devine extrêmement serré, cet opus sent bon l’opportunisme. C’est le film de trop, celui qui arrive trop tard, qui n’a plus grand chose à dire. Violent Shit n’a jamais été un sommet de réflexion, mais la trilogie, malgré ses défauts et un côté très amateur à ses débuts, apparaissait comme un terrain de jeu et d’expérimentations sans limite pour son principal artisan. Devant et derrière la caméra, aux effets spéciaux et au montage, Schnaas était l’homme à tout faire, vrai père d’un projet qu’il a bâti à la sueur de son front. En seulement quelques années les progrès à l’écran étaient frappants, jusqu’à l’apogée finale atteinte avec Violent Shit 3, conclusion gorissime et débridée d’une saga culte à en devenir. Désormais quarantenaire la flamme de la jeunesse s’est éteinte. Disons le clairement, le père Schnaas n’en a plus rien à foutre. Malgré ses crédits à la réalisation et à l’écriture, le vrai patron c’est Timo Rose, présent à tous les postes (photo, montage, musique, production, effets spéciaux).
Si les œuvres de Schnaas ont toujours été plutôt bourrines et bas du front, elles s’abstenaient pourtant de virer à la bouffonnerie totale et au je-m’en-foutisme intégral. Les 1h15 apparaissent interminables face à cette suite de sketchs plus débiles les uns que les autres. On peut imaginer que le tournage s’est fait sans scénario clair et précis, chaque séquence de dialogue donnant lieu à des cabotinages au mieux absurdes, au pire terriblement gênants. L’acting n’a jamais été la force de ce cinéma évidemment, mais un strict minimum permettait par exemple à Infantry of Doom de suivre facilement les péripéties de protagonistes à minima dans le ton. Violent Shit 4 ne cherche qu’à se vautrer dans sa propre nullité. L’exemple parfait du nanar volontaire qui conscient de ses limites, préfère afficher une débilité non-stop au détriment de la moindre idée.
La Troma a prouvé qu’on pouvait faire un cinéma régressif et jouissif. Ce que Timo Rose a oublié en chemin par rapport à son modèle, c’est une certaine rigueur. Si Toxic Avenger et Poultrygeist sont désormais cultes, c’est que derrière le mauvais goût apparent et leurs excès, il y a un vrai travail de timing, de réflexion et de mise en scène. Ici tout nous est balancé à la gueule sans le moindre respect pour le spectateur. On a l’impression d’assister aux délires d’une bande de potes qui s’est filmée pendant ses week-end dans les décharges allemandes les plus reculées du pays. Les scénettes s’enchaînent au rythme de l’écriture d’un script invisible et sûrement improvisé.
De mauvais acteurs, un montage à la ramasse et un récit prétexte à aligner les scènes gores, voilà seulement une série Z gore de plus, oubliable et pardonnable. Sauf que Karl the Butcher vs Axe parvient également à foirer le peu d’intérêt qu’on pouvait encore lui accorder. Certes, certaines scènes gores restent sympathiques, mais comment peut-on autant régresser après le festival du troisième opus, ses colonnes vertébrales arrachées à même l’anus et ses visages écartelés à coup de crochets ? On en revient à notre nouveau chef d’orchestre, Timo Rose. Artisan correct, il peine cependant à élever son imagination au niveau de celle de son mentor ou d’un Olaf Ittenbach. Décapitations, geysers de sang et membres coupés, le panel de mise à mort fait pâle figure. De plus, quelques effets numériques, notamment des éclaboussures de sang, sont incrustés ci et là. Comme si un chanteur de métal avait recours au play-back lors d’un concert. On frôle le sacrilège ultime.
Voulant ressusciter une saga iconique, ce nouveau Violent Shit est un doigt d’honneur adressé à son public. Jouant la carte de l’horreur comique, ce tâcheron de Timo Rose balance tout et n’importe quoi à la tronche des spectateurs, n’importe comment et sans la moindre réflexion, pendant que Schnaas s’amuse sûrement beaucoup à renfiler sa tunique de Karl le boucher, imbibé par les quelques Kronenbourg descendues avant la prise. Citons également les effets sonores en mode cartoons insupportables rajoutés au montage, qui clouent définitivement au pilori ce long-métrage opportuniste et fait par-dessus la jambe. Après la fureur démentielle des années 90, difficile d’exister pour la nouvelle génération du gore allemand, qui peine à redéfinir les limites subversives chères à leurs prédécesseurs. Même constat pour Indiana Jones et Violent Shit : le quatrième épisode n’existe pas.