Réalisateur : Sylvester Stallone
Année de Sortie : 2008
Origine : États-Unis
Genre : Action Bodybuildée
Durée : 1h32
Le Roy du Bis : 7/10
Thibaud Savignol : 6/10
Primal Instinct
« War, War never changes », Fallout
Si la guerre garde toujours le même visage, l’Homme lui aussi ne change jamais vraiment. Un guerrier comme John Rambo ne pouvait pas longtemps ignorer ses plus primaires instincts, même isolé aux confins de la jungle Birmane pour y chasser des cobras. Sylvester Stallone ne peut pas s’empêcher de se mettre en scène même à 60 ans, puisqu’il a gardé le physique d’un authentique athlète comme on a pu le voir un an auparavant dans Rocky Balboa, probablement l’opus le plus touchant de la saga qui jouait de cette nostalgie mélancolique envers le passé lorsqu’il était encore au top du box office et des rings de combats. Un dernier baroud d’honneur offert à une icône qui en avait désespérément besoin pour se sentir encore désiré mais surtout en vie.
Un an après, voilà qu’il remet le couvert avec son autre héros non moins légendaire et une musculature peut-être même plus imposante qu’auparavant. Rambo était devenu le pantin du triomphalisme américain, juste bon à faire des rillettes de niakoués à coup d’arbalète explosive ou à dégommer du soviet dans les plaines arabiques. Ce 4ème épisode constitue presque un retour aux sources pour le guerrier déchu qui pensait avoir enterré tout cette haine avec lui. Que nenni, le voilà devenu passeur sur le long fleuve du Styx, prêt à livrer des missionnaires naïfs et un peu trop insistants à l’enfer d’une Guérilla qu’ils ne soupçonnaient pas. Pourquoi a-t-il changé d’avis ? Sûrement pour dévoiler toute la misanthropie de ce bout du monde à une femme profondément humaniste qui se voile la face concernant la sinistre réalité qui anime ces contrées sauvages et infinies.
Des cris de terreur et d’agonise des corps démembrés, des têtes qui explosent sous les détonations, des courses à la mort dans des rizières minées, des génocides cruels et abjectes dont rien ne nous est épargné. Voilà ce que constitue ce paradis perdu, le bout du monde c’est aussi le bout de la civilisation où les problèmes se règlent à coup de canon et de bonnes vieilles explosions. Et comme on ne peut pas laisser d’honnêtes ressortissants américains se faire torturer, qui est-ce qu’on envoie pour une mission sauvetage à votre avis ? John Rambo va lui même s’y résigner, raviver son instinct de guerrier et s’engager dans un conflit qui n’est pourtant pas le sien. Comme on le sait, le bougre n’y va pas la fleur au fusil et encore moins avec le dos de la cuillère pour écraser ses ennemis. Non, John est devenu un ange exterminateur capable de réduire un bataillon entier en charpie.
Le film est donc une ode à la brutalité et à la barbarie, parce que la guerre ça n’a rien de joli. Le tout est tourné avec une certaine forme de naturalisme cru comme le fut Apocalypto de Mel Gibson quelques temps auparavant. Et c’est bien ce qui fait toute la force de ces images brutes de décoffrage à l’heure où Hollywood donne plutôt dans la surenchère (Die Hard 4) et l’iconisation d’épopées guerrières (300). Certains ont ricané bêtement devant le déferlement de morts à l’écran, prétextant la stupidité et la faiblesse de l’argument pour justifier ce bain de sang. Et pourtant, c’est justement dans cette rage primale que constitue le cœur de l’ouvrage, parce que son héros ne peut s’accomplir pleinement que dans le chaos qu’il engendre lorsqu’il dégomme des vagues entières de bidasses à la mitrailleuse. C’est tellement gore et sanguinolent que cela en devient carrément jubilatoire et fascinant. Ces corps pulvérisés sous l’effet des rafales apportent presque un aspect surréaliste au film comme s’il ne s’agissait que du rêve cathartique et auto-destructeur d’une psyché tourmentée. Ce n’est pas seulement un voyage au bout de l’enfer que s’inflige John Rambo, c’est un voyage au bout de lui-même.