
Réalisateur : Albert Pyun
Année de Sortie : 1994
Origine : États-Unis
Genre : La Bagarre
Durée : 1h30
Le Roy du Bis : 4/10
L’Ange Bagarreur
Après avoir vengé la mort de ses deux frères, démantelé un réseau de prostitution et sillonner le globe pour se bagarrer contre tout le monde, c’est désormais l’heure de la déchéance pour David Sloan. Jeté en prison suite à un coup de l’affreux Tong Po, ce dernier en a également profité pour enlever sa femme et en faire son esclave docile et corvéable à merci. Pour ceux qui auraient loupé le coche, l’introduction se chargera de leur rappeler les événements survenus lors des deux premiers épisodes. Albert Pyun reprend les rênes d’une franchise s’étant quelque peu égarée en cours de route, quelque part dans la jungle sud-américaine à la lisière des nanars de Godfrey Ho.
Fantasme Melvilien
Après une escapade exotique virant au concert de balles, la saga Kickboxer renoue enfin avec l’ADN de la série, à savoir la vengeance et la baston. Michel Qissi démissionnaire, Kamel Krifa, un autre copain de JCVD, reprend le rôle laissé vacant, parce qu’il fallait bien un arabe pour interpréter un thaïlandais. Sasha Mitchell s’inscrit désormais dans la tradition du héros melvilien (mutique, affublé de lunettes de soleil, des airs taciturnes et taiseux). Après avoir joué les action star en dessoudant des gangsters dans les favelas, le voilà désormais au mitard.
Le comédien, plus monolithique que jamais, semble avoir fait une croix ferme et définitive sur ses rêves de glorieux succès, levant les pieds sans conviction pour latter des culs et flanquer des raclées par douzaine à des grosses fiottes de bikers. David Sloan n’est plus qu’une figure vaporeuse, un ange bagarreur et ténébreux détruisant des bars et le mobilier comme un adolescent piqué au vif. Le personnage se met sur les traces de Tong Po afin d’infiltrer son Kumité d’art martiaux avec l’appui de la DEA.

Cette intrigue sert surtout de prétexte au déroulement d’un tournoi réunissant des combattants du monde entier, aux techniques disparates (capoeira, judo, karaté, taekwondo, muay thai, kickboxing), contre la promesse d’un butin à la clé pour l’heureux vainqueur. On nous avait promis les meilleurs, mais le public se retrouve avec des tocards et des handicapés moteurs. Les combattants peu impressionnants se font maraver par une gamine de 16 ans qui n’a que de la compote de pomme dans les bras. Les bastons et chorégraphies paraissent plus simulées qu’exaltées au grand désarroi des fanas d’ultra violence.
Kumite des Ratés
En voulant reproduire la formule gagnante de Bloodsport et Opération Dragon, Albert Pyun s’est lancé à tête baissée sans jugé bon de se préparer plus longuement. L’art des chorégraphies de combats et rebondissements requiert une intrigue solide et agile. Malheureusement ce scénario sclérosé ne tient pas debout, titube et s’effondre sous son propre lumbago de clichés. Et encore cela n’est rien comparé à la bêtise de son antagoniste perdant toute sa crédibilité, lui qui en imposait tellement autrefois sans jamais moufter un mot à l’écran. Tong Po ne pourra jamais s’empêcher d’ouvrir la gueule pour impressionner la galerie avec des phrases plus longues que la vie, entre deux fous rires sardoniques auto-suffisants.
Le maquillage opéré sur Kamel Krifa est un ratage complet, dont le lifting menace de péter à tout moment. Son responsable mériterait d’être jeté en prison et molesté à coup de bâton. Après avoir passé une bonne heure à scruter sa némésis de loin comme de près, David Sloan fera enfin tomber le masque (ou plutôt les lunettes). Néanmoins, le réalisateur aura toutes les peines du monde à justifier ce face à face sans queue ni tête. À force d’essuyer des coups, Tong Po a certainement dû subir des effets irréversibles sur ses connexions neuronales au point de ne pas reconnaître son pire ennemi.
La vérité est peut-être ailleurs, dans la photographie de George Mooradian. Le chef opérateur attitré d’Albert Pyun éclaire le film comme une hallucination (nuit bleutées, cadre crépusculaire), donnant l’illusion d’assister au fantasme morbide d’un taulard dans le déni, dévoré par la haine et stimulés par ses pulsions sexuels (sa femme est réduite en esclavage, le film dispose de plusieurs scènes érotiques). Pour apprécier Kickboxer 4, il vous faudra certainement consentir à revoir vos exigences à la baisse et à ranger votre incrédulité au vestiaire.



