[Critique] – Johnny Mnemonic


Johnny Mnemonic Affiche Film

Réalisateur : Robert Longo

Année de Sortie : 1995

Origine : États-Unis / Canada

Genre : Course Contre La Montre

Durée : 1h38

Le Roy du Bis : 6/10
Thibaud Savignol : 6/10


Speed 2077


Robert Longo appartient à cette petite caste d’artistes qui n’ont réaliser qu’un seul film au cours de leur carrière. Moins célèbre qu’un Charles Laughton avec La Nuit du Chasseur, son Johnny Mnemonic a acquis au fil des années le statut de petit film culte. William Gibson, pape du mouvement cyberpunk depuis la parution du Neuromancien en 1984, adapte lui-même pour le grand écran une de ses nouvelles parue dans le recueil Gravé sur Chrome. Il sera très critique vis à vis du résultat final, déclamant depuis des années que ce n’est pas son scénario qui a été produit, mais un script retouché par la suite. L’arrivée de Keanu Reeves sur le projet pour remplacer Val Kilmer parti tourner Batman Forever (pas le choix de carrière le plus brillant) permet de lever 25 millions de dollars auprès de Sony Pictures. Enthousiastes à l’idée de récupérer la star de Speed, gros succès au box office l’année précédente, ils sont persuadés de réitérer l’exploit en faisant de Johnny Mnemonic l’un des blockbusters stars de 1995.

En 2021, alors que de puissantes multinationales contrôlent la société du futur, un internet omnipotent régit désormais notre quotidien. Plutôt inspiré côté anticipation. Face à ces corporations s’organise la résistance, notamment grâce aux rebelles Loteks, prêts à en découdre armes au poing. Au cœur de ce chaos, Johnny Smith, messager cybernétique, accepte une dernière mission. Il doit livrer des informations d’un point A à un point B, ces dernières étant chargées directement dans son cerveau via des puces neuronales. Suite à l’assassinat des ses employeurs par des yakuzas désormais à ses trousses, il doit trouver un moyen de débloquer le code qui rend l’accès à ces informations impossible. S’en suit alors une traque mouvementée dans les rues labyrinthiques d’une mégalopole fracturée, où la misère se répand autour d’un centre-ville toujours plus riche, technologiquement à la pointe et âprement défendu.

La force du film, derrière une trame somme toute classique, est le soin apporté aux designs et à la direction artistique comme extension d’une histoire avant tout visuelle. Longo est un dessinateur, mais également un peintre et un sculpteur, et cela se sent à l’écran. Une grand réflexion en amont a permis la création de ce monde, le rendant palpable, tangible. Il cherche à dépeindre un futur baigné de technologie mais où le facteur humain reste au centre des enjeux. Bien qu’obsolète aujourd’hui sur certaines représentations ou aspects techniques, rares sont les films à l’ADN cyberpunk aussi marquée. Souvent toile de fond, c’est ici le cœur du film.

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Outre les corporations et son futur dystopique, c’est avant tout l’immersion dans cette ville aux relents d’anarchie et la mise en avant de technologies originales qui constituent sa grande réussite. Entre implants cybernétiques, informations codées, capacités humaines augmentées et arsenal futuriste, toute la panoplie du genre est étalée à l’écran, grâce à une esthétique qui sait se mettre au diapason de la diégèse du film. Sans sur-expliquer, mais en s’appuyant sur un filmage habile, faisant des mutations technologiques le cœur de son récit, Johnny Mnemonic parvient à illustrer les fantasmes de toute une communauté.

Passé une première demi-heure tonitruante le film retombe sur des rails plus classiques. Un chemin balisé mais non dénué du charme propre aux actionners nineties, avec leur pyrotechnie toujours plus démesurée. La multiplication de personnages et de lieux permet de maintenir le spectateur en éveil, jusqu’à son final pétardant qui met en scène intelligemment la verticalité spatiale propre au cyberpunk, où les villes du future n’ont de cesse de défier la gravité. On mentionnera également la bonne surprise de découvrir Takeshi Kitano en caïd de la mafia pour son premier rôle à l’internationale.

S’ajoute à cela le très approximatif Ice-T, avec sa nonchalance débordante de cooltitude, et un Dolph Lundren en prédicateur fou et ultra violent, qui aurait été apparemment sévèrement coupé au montage. Il est aujourd’hui possible de prolonger l’expérience avec la ressortie du film en Blu Ray dans une version noir et blanc voulue par le réalisateur et encouragée par Sony Pictures. S’inspirant d’Alphaville de Godard et de La Jetée de Chris Marker, Longo a eu accès aux pellicules d’origine pour effectuer la conversion voulue. Alors que la réalité a dorénavant dépassé la fiction (cette critique est écrite 3 ans après les évènements du film), le long-métrage retrouvera peut-être une aura d’anticipation intemporelle que la couleur ne permet plus.

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