Réalisateur : Dale Resteghini
Année de Sortie : 2000
Origine : États-Unis
Genre : Arnaque Filmique
Durée : 1h25
Le Roy du Bis : 1/10
Thibaud Savignol : 1/10
Don’t Fuck with the Witch !
«Un thriller surnaturel décapant, qui marche sur les traces du Projet Blair Witch». Voilà ce que nous vend la jaquette de ce Da Hip Hop Witch. On cherche encore l’un et l’autre. Film ultra oppoturniste faisant suite au succès planétaire du célèbre Found-footage, Da Hip Hop Witch constitue probablement le premier braquage cinématographique de ce début de nouveau millénaire. Au-delà du mauvais film, du projet raté ou d’une volonté de bien faire, arrivent de temps en temps sur nos écrans ces œuvres qui appartiennent au registre de l’arnaque. Citons par exemple 3 From Hell d’un Rob Zombie en roue libre, caricaturant à l’outrance son propre style en levant bien haut le majeur, ou encore la version 2017 du Cercle (Rings), pseudo remake/reboot/suite (rayez la mention inutile), qui tentait de relancer une saga sûrement plus assez rentable pour le studio américain possédant les droits.
Réalisateur de l’inédit dans nos contrées Colorz of Rage en 1999, Dale Resteghini est surtout connu pour sa carrière dans le clip à partir des années 2000. On lui doit notamment le célèbre clip Crank That de Soulja Boy. Après avoir visionné, et sûrement apprécié le long métrage de Sanchez et Myrick, Dale s’est dit qu’il tenait là une idée révolutionnaire, celle de mixer le gangsta rap au film d’horreur. A New-York, ces dernières semaines, les rappeurs ne sont plus sereins. Une sorcière rôde, prête à leur faire la peau. Dans ce contexte, un producteur de musique offre la coquette somme de dix millions de dollars à quiconque en viendra à bout. Une petite troupe de blancs-becs issus des banlieues résidentielles flairent le bon coup et se mettent sur sa piste. Pour cela, ils devront d’abord enquêter auprès des nombreux rappeurs urbains concernés.
Deux films vont ainsi se télescoper. Faisons bref pour la partie horrifique, qui se rapproche du néant. On nous présente une bande d’allumés façon télé-réalité accompagnés du chien Pug (littéralement le nom de sa race), se la jouant journalistes d’investigation, avec un look début 2000 à la ringardise assumée. Plus proche d’attardés en manque de reconnaissance que des investigateurs en herbe du Projet Blair Witch, leur présence à l’écran se résume à une cacophonie répétitive dénuée de la moindre mise en scène : ça beugle, ça ricane et ça sur-joue l’effroi comme dans un mauvais film muet des années 30. Comme climax de terreur, le club des 5 finira dans une tente façon camping de l’horreur pour gamins de 12 ans, avant que le tremblement d’une branche les fasse déguerpir aussi vite qu’ils sont arrivés. Une partie du métrage sous-exploitée, ridicule, tournée avec le cul, pensant qu’agiter une caméra dans New-York avec cinq débiles qui tournent autour suffit à créer quoi que ce soit. Comment ça ? Une Parodie ? Ah mais tout prend sens dans ce cas là !
Ah bah non en fait, même après un second visionnage au 42e degré, ça reste toujours aussi nul. Comme l’avait si bien expliqué le crack Karim Debbache dans son Crossed dédié à Postal, ce n’est pas parce qu’on prétend filmer au second degré que cela en devient automatiquement drôle. N’est pas Scary Movie qui veut. Non, ce qui intéresse davantage ce petit malin de Dale Resteghini, c’est caser tous ses potes rappeurs et profiter de son réseau pour monter un long-métrage. Il peut ainsi filmer à moindre coût des interviews sans queue ni tête, où chaque artiste donne sa vision des faits. Mais c’est un tel bordel qu’on se demande si il y a eu un minimum d’écriture ou de concertation entre les différents intervenants. Quand les uns évoquent le gros ventre de la sorcière, ses ongles interminables ou sa tronche repoussante, d’autres ne cessent de vous rappeler à quel point le monstre est lubrique, prêt à faire tourner votre petit cul au fin fond d’une cave du Bronx.
La Palme revient toutefois à Eminem, le seul s’étant véritablement imposé parmi le lot d’énergumènes mis en scène (qui se souvient de Killah Priest et Royce 5’9″?). Il nous fait part de sa rencontre avec la sorcière, faîte de dégustation de beurre chaud (ou de lait en VF), de traquenard dans une ruelle sombre et d’échanges de doigts dans le postérieur à tour de rôle. Complètement lunaire, la séquence est divisée en plusieurs parties revenant régulièrement au cours du film. Mais chaque segment répète approximativement les mêmes conneries, Eminem s’affichant avec un petit pet bien entamé (comme lui), face à un pote lui posant inlassablement les mêmes questions.
D’ailleurs, juste avant la sortie du film, le rappeur et ses avocats tenteront de faire retirer ces séquences du long-métrage, en vain. Farceurs, les dirigeants d’Aritsan Entertainement décident même d’afficher sa tête sur la jaquette du DVD lors de sa parution en 2003, citant explicitement sa présence. Une façon de continuer à capitaliser sur un titre racoleur, sans intérêt, qui tient plus du délire entre potes qu’autre chose. On attend dorénavant plus que le crossover avec la sorcière de Blair, qui verra Eminem se faire beurrer la biscotte au fin fond d’une cabane abandonnée dans les bois, sur fond de Slim Shady des familles.