Réalisateur : Danny Lee et Billy Tang
Année de Sortie : 1992
Origine : Hong-Kong
Genre : Tueur Fou
Durée : 1h29
Thibaud Savignol : 6/10
Quatre femmes pour l’assassin
Le 17 août 1982 est arrêté Lam Kor-wan, surnommé «le boucher des nuits pluvieuses». Du 3 février au 1er juillet il a assassiné quatre femmes à Hong-Kong en tant que chauffeur de taxi. Lors de la perquisition de son domicile suite à son arrestation, les enquêteurs vont faire plusieurs découvertes macabres. Il conservait dans des récipients les organes génitaux fraîchement découpés de ses victimes, ainsi que nombreuses photographies des corps démembrés et suppliciés. Alors que la Catégorie 3 bat son plein depuis son intronisation en 1988 et une interdiction aux moins de 18 ans, Danny Lee flaire la bonne opportunité pour profiter de cette flopée de films ultra-violents qui déferlent sur les écrans, . Avant tout acteur, il porte également parfois la casquette de producteur depuis la seconde partie des années 80. Avec Dr Lamb, il passe à nouveau derrière la caméra (ce qu’il avait déjà fait dix ans plus tôt avec One Way Only et Funny Boys), cette fois accompagné du novice Billy Tang.
Ce dernier a passé l’essentiel de sa carrière à la télévision suite à des études dans l’audiovisuel au Canada. Après son premier essai pour le cinéma en 1989 avec Dragon Fight, le voici de retour pour Dr. Lamb, aux côtés de Danny Lee. Si c’est bien l’acteur vétéran qui est crédité du poste de réalisateur tandis que Billy Tang apparaît comme son assistant, la réalité aurait été tout autre, Tang disposant d’une latitude beaucoup plus importante. De ce fait divers dérangeant, le scénariste Law Kam-fai (The Untold Story c’est également lui) conserve les éléments les plus à même de choquer le spectateur via leur composante graphique.
Limite oblige malgré tout, le film n’osera pas représenter les organes géniaux et ce sera un bout de sein qui finira retrouver dans un bocal. Grâce à la liberté permise par la catégorie 3, les corps seront démembrés face caméra, et l’acte nécrophilique ayant eu lieu sur la quatrième victime aura lui aussi droit son moment de gloire cinématographique. Ultra stylisé, comme les différentes mises à morts et abus de corps féminins, il représente le climax amoral du film, où le meurtrier explose les verrous de la bienséance, déjà bien entamés.
Plutôt que de jouer d’un suspense macabre et artificiel, le choix est fait de filmer l’arrestation de Lam Kor-wan dès le début. Comme dans la réalité, c’est l’employé d’un magasin de développement de photos Kodac qui donne l’alerte à la police, suite à la découverte photogrammes érotiques suspects (les femmes en question paraissent mortes). L’enjeu du film sera alors de prouver la culpabilité du tueur, très réticent à avouer au départ malgré tous les éléments retrouvés chez lui, puis de reconstituer son basculement dans l’horreur lors des six derniers mois.
Soumis au brimades de flics brutaux, à l’instar de The Untold Story, l’assassin décide de narrer ses exploits. Se justifie alors le choix de Billy Tang de proposer une imagerie léchée, aux tableaux parfois sublimes (ce taxi entouré d’une pluie diluvienne sous les néons de la ville), comme pour mieux séparer la réalité crue du monde fantasmatique dans lequel s’est échappé son protagoniste. Lam Kor-wan désire le corps féminin, le sublime par ses photos, et met en scène sa propre folie. Le résultat apparaît donc stylisé, rempli d’éclairages colorés, aux mouvements de caméra élégants, pour mieux coller à l’univers torturé et esthétisé d’un tueur qui se rêve en artiste.
On déplorera peut-être cette introduction un brin putassière, où le futur assassin, alors enfant, soulève la jupe de sa sœur et observe ses parents en plein devoir conjugal. Une justification de ses penchants voyeuristes et de ses pulsions sexuelles inassouvies qui résonne plus comme de la psychologie de comptoir un peu légère. Mais en ce qui concerne la partie adulte, Simon Yam, par son jeu certes outrancier, compose un psychopathe ambigu, calme voire timide au quotidien, qui laisse exploser toute sa démence lors des soirs de pluie (le facteur excitant qui le pousse au meurtre). Les séquences avec ses victimes dans le taxi apparaissent alors comme un face à face direct avec le mal à l’état pur, au cœur d’une Hong-Kong nocturne et déserte, où personne ne les entendra crier.