
Réalisateur : Richard Raaphorst
Année de Sortie : 2013
Origine : États-Unis / Pays-Bas / République Tchèque
Genre : Horreur Burnée
Durée : 1h26
Le Roy du Bis : 6/10
Thibaud Savignol : 5/10
Medal of Horror
Durant longtemps, nous avons attribué la paternité du Found Footage à Eduardo Sánchez et Daniel Myrick (Le Projet Blair Witch) mais à tort. En fouillant les archives de l’ex Union Soviétique, nous avons fait une découverte capitale envoyant en éclats nos certitudes sur le sujet. Tout était déjà là : les jump-scares opportunistes, les effets racoleurs, la saturation du son, la caméra tremblante.
Visiblement il y a des choses qui ne changent pas, et nos ancêtres ne savaient déjà pas tenir correctement une caméra. Frankenstein’s Army est le cas concret d’un film qui aurait pu prétendre à devenir une excellente série B si le projet avait pu bénéficier d’une plus grande envergure. Pyramide, Area 51 et Apollo 18 proposaient des environnements atypiques à défaut de renouveler les codes propres au genre. Le film de Richard Raaphorst ne vend pour sa part que du sang, de l’horreur et des monstres.
Conçu comme un authentique reportage de guerre, Frankenstein’s Army suit le quotidien d’une escouade russe à l’orée de l’armistice. La première partie constituée d’affrontements et d’errements ne vise principalement qu’à introduire des personnages stéréotypés jusqu’à l’os. Malheureusement, les échanges en anglais (avec un accent russe à couper au couteau) nuisent largement à l’authenticité recherchée par le cinéaste. De guerre lasse, le public doit se résigner à partager les peurs et préoccupations de ces soldats destinés en chair à greffon.

Ce travail de représentation (assistance aux populations démunies, bienveillance calculée envers les prisonniers ennemis…) sert une propagande assez peu subtile dont le contenu politiquement correct finira rapidement par s’étioler à mesure de leur enfoncement sur le front de libération. Car si ce n’est pas l’argent, ce sont bien les médailles et la reconnaissance de la nation qui font sortir les cocos du bois. Malgré ces choix perfectibles de mise en scène, l’intrigue parvient à sortir de l’ornière à l’approche d’une église servant de laboratoire secret. Le Docteur Frankenstein souhaite réconcilier les deux blocs en raccommodant les membres et cerveaux des soldats passant sous son bistouri, laissant alors le champ libre aux expérimentations et excentricités les plus barges.
Frankenstein’s Army prend alors une dimension aussi ludique qu’un jeu vidéo en vue subjective, à travers une série de décors labyrinthique envahis de créatures biomécaniques. Ce bestiaire extraordinaire munis d’armes et d’outils (scie, lames, faucilles) greffés à la place des bras, ainsi que d’attributs aussi incroyables qu’handicapant (scaphandre, hélice, ou marteaux piqueurs en guise de casque), leurs confèrent une lenteur d’inertie limitant considérablement la menace surgissant à l’écran. L’atmosphère horrifique et la nervosité de la mise en scène se retrouve alors pris en étau, entre le marteau et l’enclume, entre le grand guignol et l’horreur pure.
Hélas, ces séquences faisant la part belle aux nombreux cosplays (un ED-209 rouillé tiré du film Robocop trône en bonne place) révèlent également toute l’artificialité de ce train fantôme, malgré les nombreux débordements gores et outrancier à l’œuvre (cette chaîne de production morbide pleine de cadavres ambulant, de membres amputés et de viscères). Aussi boiteux que son soldat SS sur des béquilles, Frankenstein’s Army échoue dans sa tentative d’hybridation à proposer une forme convaincante qui puisse dépasser sa nature de found footage.



