Réalisateur : Richard Waters
Année de Sortie : 2018
Origine : Irlande
Genre : Maison Pas Hantée
Durée : 1h11
Le Roy du Bis : 3/10
Thibaud Savignol : 2/10
Fais-moi (pas) peur !
Parfois, et même souvent, il est difficile d’appréhender de grands concepts scientifiques. Prenez la relativité du temps chère à Einstein par exemple. On peut facilement se perdre en de longues lectures scientifiques sans piper un mot. Pourtant, les films ont depuis permis une grande avancée dans la vulgarisation de cette théorie. Que vous regardiez Casino ou Avatar, le temps semble passer infiniment plus rapidement que lors du visionnage de ce In a Stranger’s House. Pourtant, au-delà du concept théorique abstrait du temps lui-même, ce dernier s’écoule de la même manière, que ce soit devant les chefs-d’œuvre de Scorsese et Cameron ou devant l’étron filmique chroniqué en ces lignes. Mais le ressenti, lui, n’est pas le même. Par un effet de paradoxe temporel insaisissable et confus les durées se répondent, chacune reflétant celle qui n’est pas la sienne. Oui, les 1h10 de In a Stranger’s House semblent s’étirer sur 3h d’ennui infini, là où les 180 minutes de Casino et Avatar filent à toute vitesse. Pour sûr que si il était encore parmi nous, plutôt que de congratuler ce foutu créateur de la bombe atomique aux traits dorénavant irlandais, Einstein serait fasciné par la faculté de certains films à créer des vortex temporels où le temps humain n’a plus cours.
Il en est ainsi pour Richard Waters, mettant en scène Richard Waters filmé par Richard Waters lors d’une semaine moins calme que prévue. A l’instar du Lost Footage of Leah Sullivan, le found footage termine sa mue égotrip et narcissique en apothéose. Évidemment, les images qu’on nous donne à voir sont issues d’une carte mémoire retrouvée dans un centre de recyclage. La diégèse du genre est respectée. Les images constitueront l’unique point de vue sur des événements survenus on ne sait où, impliquant le maladroit Richard Waters. Embauché pour garder une maison durant l’absence de sa propriétaire et mise à part celle-ci, il constituera le seul être humain présent à l’écran.
Son statut d’influenceur lui permet de communiquer régulièrement à l’adresse de ses fans, permettant la création d’une certaine dynamique. Pas désagréable, plutôt sympathique et «authentique», Richard s’installe tranquillement dans une petite routine pépère : télé, ménage, traîner, nourrir les animaux. En ce qui concerne ces derniers, très présents et très proches au sein de cette maison mi-ferme mi-grange, on craignait un dérapage traumatisant à la Vase de Noces. Il n’en sera rien, leurs interactions se limitant à manger, aboyer laborieusement et déféquer dans la cour. Pour Richard, il en sera tout autre. Des bruits étranges se font entendre, tels que des pleurs de bébés, tandis que les objets disparaissent et réapparaissent ailleurs.
Malgré un démarrage acceptable, à défaut d’être excitant, le film se vautre rapidement dans l’ennui le plus mortel. Jouer sur le hors champ, faire monter la tension petit à petit par à-coups successifs, un programme classique mais qui a fait ses preuves. Sauf que pour réussir son coup, il faut donner un minimum au spectateur. Et In a Stranger’s House va rater le coche à tous les niveau. A peine 1h10 au compteur donc, mais pourtant le film se traîne comme jamais, répétant les mêmes séquences en boucle, sans jamais gratifier son spectateur de l’horreur soit disant sous-jacente. Un très faible budget, clairement, mais cela n’excuse pas tout. La volonté de réalisme, criante au vu du décor principal, plombe l’immersion. Même le banal à l’écran, ça se travaille.
Aucune notion de l’espace dans cette maison anti-cinégique au possible, où tout est trop étroit, trop resserré et jamais cadré de manière effrayante. Éviter à tout prix le spectaculaire, rendre l’anodin terrifiant et angoissant, ça se travaille (bis). Balancer des images quelconques sans en extirper le moindre cachet, c’est le résultat auquel parvient le long-métrage de Richard Waters. Le found-footage a toujours été un terreau fertile pour les petites productions ou les apprentis réalisateurs fauchés. Mais on oublie souvent que le chaos ça s’étudie et se met en scène. Richard a fait son petit malin, s’est engouffré dans une brèche profitable. Mais sans efforts, pas de résultats.
Il ne parvient même pas à sauver son climax, là où beaucoup parviennent à limiter la casse en proposant un dernier rush d’adrénaline aussi vénère que salvateur (on t’oublie pas Blair Witch 2016). Le soubresaut horrifique se vautre dans le ridicule, l’enjeu final d’une bâtisse possiblement possédée se résumant à une poupée qui change de place et une porte filmée durant littéralement cinq minutes après s’être caché sous la couette. Une frousse digne de l’école primaire. On peut tout de même accorder au film d’avoir réussi à illustrer une fois de plus une théorie solidement ancrée aujourd’hui. Vraiment, seulement 1 heure et 10 minutes viennent de s’écouler ? Tout est définitivement relatif.