Réalisateur : Lee Cronin
Année de Sortie : 2023
Origine : États-Unis
Genre : Appartement Hanté
Durée : 1h37
Le Roy du Bis : 6/10
Thibaud Savignol : 7/10
Rise Againt the Evil
Réalisé en 1981 mais sorti seulement en 1983, que ce soit dans son pays natal où en France, le premier Evil Dead de Sam Raimi est une date clé du cinéma d’horreur. Ce nouvel opus bénéficie ainsi d’un timing parfait pour célébrer les 40 ans de la franchise. Après un remake sacrément efficace signé Fede Alvarez en 2013 et la série débridée Ash Vs Evil Dead chapeautée par Sam Raimi lui-même, il était temps pour la saga de regarder vers de nouveaux horizons. Alors que des hordes de fan espèrent toujours une quatrième réalisation du réalisateur inaugural, c’est au quasi inconnu Lee Cronin (un seul film et toujours pas de page Wikipédia dans la langue de Molière) qu’est confiée la lourde tâche d’accoucher d’un nouvel enfant terrible.
Premier changement et pas des moindres, l’action du récit se déplace pour la première fois en ville. Afin d’amorcer cette nouvelle direction, l’ouverture nous rappelle les basiques d’un film Evil Dead. Un petit week-end sympa entre amis autour d’un lac tourne au carnage lorsque l’un d’entre eux se transforme en Deadite, massacrant joyeusement le reste de la troupe. L’occasion pour le réalisateur de montrer les crocs, de s’adonner à quelques débordements gore pour notre plus grand plaisir avant de conclure sur l’une des plus belles apparitions de titres de ces dernières années, rien que ça.
La tension redescend ensuite en nous présentant les futurs protagonistes du récit. On suit Beth, technicienne guitare, retrouver sa sœur, ses neveux et nièces dans un immeuble vidé de ses habitants avant une prochaine destruction. Seules quelques familles y subsistent encore. Il est également temps pour Beth d’annoncer à sa frangine qu’elle est enceinte, elle qui souhaitait vivre la vie sex and rock’n roll. Fini les bandes de potes, le centre des enjeux est désormais une famille, et leur combat sera l’occasion pour Beth de se questionner sur une potentielle future maternité.
Lee Cronin prend son temps pour installer ses personnages, l’occasion d’admirer le travail sur les décors qui vont constituer un incroyable terrain de jeux (pièces de différentes tailles, couloirs, ascenseur, bouche d’aération…) et la sublime photographie, sombre et ténébreuse. Le Necronomicon créé pour l’occasion est une véritable œuvre d’art avec sa couvertures organique et ses effroyables représentations de l’enfer. En plus d’être respectueux de l’esprit Evil Dead avec ses personnages isolés du monde extérieur et ses invocations de l’au-delà, le réalisateur prend plaisir à imiter à de rares occasions le style Sam Raimi, et notamment cette fameuse caméra se frayant un chemin à travers les lieux (dans la forêt en ouverture puis dans le parking de l’immeuble ensuite).
Une fois l’invocation réalisée et la mère possédée, le film lâche les chevaux et ne s’arrêtera plus avant le générique de fin. Le jeu du chat et de la souris entre les Deadites et les vivants ne connaît aucun répit, d’une pièce à l’autre, d’un couloir à l’autre. Personne ne sera épargné. Là où on craignait que la présence d’enfants/adolescents serait un sérieux frein au carnage, il n’en est rien. Ils ne sont pas plus protégés que les adultes, et tous ne passeront pas la nuit. Cronin s’en donne à cœur joie, mixant parfaitement les délires comico-gores de la trilogie originelle (savoureux clin d’œil) avec une violence beaucoup plus premier degré héritée du remake. Le scénario rivalise d’idées lors de mises à mort toujours plus sadiques, que ce soit à l’aide d’une râpe à fromage ou de morceaux de verre en travers de la gorge. A l’instar de Sam Raimi, le metteur en scène joue de sa caméra dans des angles impossibles, notamment cette séquence filmée à travers un judas où le couloir se transforme en véritable boucherie. Il pousse le curseur encore plus loin lors d’un climax dantesque, rendant hommage à la fois à Shining et aux mutations corporelles improbables de la saga via un Némesis sorti tout droit des limbes.
Avec sa gestuelle disloquée, son visage atypique et sa grande chevelure rouge, impossible de passer sous silence la performance XXL d’Alyssa Sutherland. Un atout de taille pour ce coaster horrifique qui propose l’un des plus beaux antagonistes de la franchise. Une production qui rejoint des tentatives extrêmes récentes comme The Sadness et Terrifier 2. Après des années de vache maigre dans nos salles, le cinéma gore est peut-être en train de renaître de ses cendres. Bien qu’un nouvel Evil Dead réalisé par Sam Raimi serait hautement réjouissant, celui de Lee Cronin nous rassure quand à la perpétuation de l’esprit de la saga. On en demandait pas plus.