Réalisateur : Stuart Gordon
Année de Sortie : 1987
Origine : États-Unis / Italie
Genre : Horreur
Durée : 1h18
Le Roy du Bis : 7/10
Thibaud Savignol : 6/10
Le Syndrome de Peter Pan
Érigé au panthéon du cinéma d’horreur dès son premier essai, Stuart Gordon se voit naturellement confier la réalisation de From Beyond, une nouvelle adaptation lovecraftienne d’Empire Pictures, mais devra auparavant s’acquitter d’un autre projet tourné parallèlement dans un décor mitoyen des studio Dinocita, afin d’économiser sur les frais de production. Dolls naît d’un simple visuel promotionnel destiné à assurer les préventes à l’étranger, pour lequelles Ed Naha, journaliste chez Fangoria, sera missionné d’écrire le scénario comme il l’avait auparavant fait pour Troll, autre succès de la firme en VHS. Comme souvent le producteur Charles Band s’emballe et demande à ce que son film de poupées tueuses soit aussi agressif et gore que Re-Animator, tandis que son réalisateur souhaite aborder le projet comme un conte macabre d’avantage accès sur l’ambiance que sur ses effets chocs. Les deux parties parviennent finalement à un compromis pour livrer ce qui est encore aujourd’hui considéré comme l’un des sommets du genre.
Sur la route des vacances, la famille Bower se retrouve embourbée suite à un violent orage et trouve refuge dans un vieux manoir isolé. Ils sont accueillis par les Hartwick, un couple de collectionneurs chaleureux qui leur offre le gîte et le repas. Le décor est d’un autre temps, les murs sont décrépis et les pièces de vie sont envahies de poupées semblant dévisager les visiteurs. Ces derniers seront bientôt rejoints par deux pétasses chapardeuses en constante rébellion, ainsi que par un homme plus avenant souffrant de toute évidence du syndrome de Peter Pan. Non content de jouir de l’hospitalité de leurs hôtes, les invités les plus malveillants se verront sévèrement châtiés par les jouets possédés de la maison.
Et pour qui a déjà rêvé voir ses parents se faire dévorer par un ours en peluche géant après avoir été puni ou bien de voir ses petits soldats tirer sur les gens, le film se fait un plaisir de le mettre en images. N’allez pas pour autant conclure que Dolls est une comédie horrifique, même s’il sait parfois distiller une bonne dose d’humour noir lors de ses mises à morts. Il y a quand même de quoi développer une véritable pédiophobie face à ces gros contingents de jouets déchaînés et animés en stop motion par David Allen.
Imaginez un instant vous retrouver encerclés de tous les côtés par des poupées hargneuses armées de marteaux et de ciseaux, qui vont jusqu’à vous couper les pieds avec une scie ou bien à vous ronger le sang avec leurs dents, et revenez nous dire après que vous vous sentez de taille à tous les affronter en tenue de pyjama. Finalement le film est non seulement un cauchemar pour les plus jeunes, mais également pour les adultes ayant conserver leur âme d’enfant. D’autant qu’il invite le spectateur à mettre de côté son scepticisme et à croire en l’imaginaire et au fantastique. La fin constitue d’ailleurs une chouette morale digne des contes européens, puisque seuls ceux qui ont su préserver leur innocence seront épargnés. Une suite fut à l’époque envisagée mais c’est finalement sous d’autres franchises que son producteur continuera d’exercer son fétichisme exacerbé pour les poupées. Naîtrons une flopée de succédanés mais surtout la saga Puppet Master, qui emprunte le même acteur (Guy Rolfe) dans le rôle de l’enchanteur André Toulon. Comme quoi, on est jamais trop vieux pour jouer avec des poupées, fussent-elles de porcelaine ou bien de chair et de sang.