Réalisateur : Dutch Marich
Année de Sortie : 2021
Origine : États-Unis
Genre : Horreur Forestière
Durée : 1h22
Le Roy du Bis : 6/10
Thibaud Savignol : 4/10
Un cri dans la nuit
Dans le désert, personne ne vous entendra crier qu’ils disaient. Dans l’imaginaire horrifique, le désert charrie de nombreux mirages, on est jamais à l’abri d’y faire une mauvaise rencontre, d’autant que c’est aussi la litière préférée des criminelles mais également un terrain de jeu fertile pour les complotistes (les ovnis, la zone 51). À ce jeu là Dutch Marich préfère jouer la carte de la suggestion, du moins jusqu’au dernier quart d’heure du film renouant avec l’essence même du Foud footage, suite à la découverte de l’enregistrement de son randonneur porté disparu. Il est d’ailleurs plutôt étonnant que cet environnement n’est pas servi plus tôt de cadre au genre, si ce n’est dans le très mauvais Area 51 de Oren Peli et même si nous avons vu Outwaters débouler dernièrement, poursuivant l’idée de chimères lovecraftiennes et d’une folie extrospective.
Outre la nature inhospitalière de ce territoire, il faut également composer avec une faune carnassière et sauvage (ours, scorpions, crotales, serpents à sonnette), sans compter que le site du Nevada a également servi aux expérimentations nucléaires des Etats-Unis et qu’il fourmille des spectres de la conquête de l’Ouest et des mauvais esprits comme le Wendigo. Qui est Gary Hinge ? S’est-il simplement égaré comme les autorités le soulèvent, aurait-il été la proie d’une entité ou bien d’un meurtre en bande organisée ? Qu’est ce qui peut bien se cacher dans ces bois et en ces terres les plus reculées ? Autant de questions qui trouveront finalement leurs réponses grâce à un itinéraire tout tracé, qui à défaut de vous surprendre pourrait bien vous flanquer quelques sueurs froides.
Horror in the High Desert est donc un faux documentaire qui emploie les mêmes effets racoleurs que les émissions de fait divers type RMC : des interviews de proches à l’appui tentant d’élucider ce mystère en regroupant toutes les informations et archives à disposition, entrecoupées d’images de reconstitutions, d’interventions de journalistes et d’enquêteurs qui émettent leurs propres hypothèses. L’enquête est donc assez crédible et envisagée sous le prisme cartésien, puisque l’on suppose que le randonneur a sûrement été victime d’un accident pédestre ou bien d’une insolation faute de préparation suffisante. Pourtant, certains témoignages évoquent également des conflits familiaux et broutilles entre amis, apparemment sans incidence ni rapport avec l’intrigue.
Cela a néanmoins le mérite d’étoffer le portrait on ne peut plus crédible de Gary, jeune homme présenté comme quelqu’un de très solitaire, qui n’a jamais pris l’habitude de laisser des nouvelles à ses proches lorsqu’il se lançait dans ses excursions commandos, bien que sa sœur puisse affirmer le contraire à tort. Preuve en est, personne ne connaissait véritablement le personnage qui cultivait un petit jardin bien secret, entre une homosexualité non assumée et une communauté de 50 000 followers sur les réseaux sociaux. Il prenait toujours la peine de filmer chacune de ses découvertes parfois insolites : une mine ainsi qu’un chemin de fer abandonnés, ou bien des vestiges de l’implantation des premiers colons.
Ses nombreuses vidéos vont mettre à jour une autre hypothèse aussi surprenante que saugrenue, étayée par la découverte d’empreintes dans son véhicule, retrouvée à mille lieues du site de sa véritable disparition et ce dans le but d’étendre la zone de recherche déjà immense. Gary aurait été le témoin d’une présence paranormale dans les montagnes qui l’a amenée à témoigner de son expérience, avant d’être la victime d’un cyber-harcèlement des internautes qui crieront un peu comme nous au canular opportuniste. Une petite pique adressée aux spectateurs toujours en quête de sensationnalisme et qui pousseront d’ailleurs le personnage à retourner braver le danger. Quelque temps après, une découverte macabre à proximité d’un campement nous amènera à reconsidérer notre point de vue grâce aux enregistrements du randonneur dont la caméra aura capté les derniers instants. Le documentaire propose alors de nous en dévoiler les rushs, qui finiront par embrasser la notion de territoire mainte fois rebattue dans le survival (Massacre à la Tronçonneuse, La Colline a des yeux, Détour Mortel, Wolf Creek).
La fin ne laisse dès lors plus aucune place pour la suggestion, ce qui divisera forcément les spectateurs. Pourtant, en se reconnectant aux thématiques et artifices si chers au Found footage, le réalisateur nous livre un dernier quart d’heure suffisamment effrayant, où les distorsions sonores servent autant de leurre qu’à accentuer la peur lors d’une partie de cache-cache dans les collines tourné en caméra infrarouge. Même si le film aurait sans nul doute gagné à en montrer moins. La conclusion laisse ainsi le champ libre à une suite hypothétique, ainsi qu’au développement d’une légende urbaine qui risque d’amener bon nombre d’imbéciles armés de leur objectif vers un nouveau massacre.