
Réalisateur : Giordano Giulivi
Année de Sortie : 2017
Origine : Italie
Genre : Fantastique Cérébral
Durée : 1h45
Le Roy du Bis : 7,5/10
Des pions sur un échiquier
Une équipe de chercheurs tente de simuler la chute d’un verre afin de pouvoir quantifier le nombre d’éclats lors de l’impact, en basant leurs recherches sur la théorie des probabilités. Le groupe est invité à partager ses découvertes avec un de leur confrère dans un manoir au sommet d’une île isolée. Mais une fois arrivés à destination, les huit convives sont faits prisonniers d’un vaste échiquier dont ils se trouvent être les pions. Traqués par une sinistre reine de fer, les survivants tentent de s’organiser et de survivre à cette menace ourdie par l’énigmatique maître des lieux, ayant pris soin d’enregistrer une cassette préméditant les moindres faits et gestes des survivants selon la théorie du démon de Laplace.
Il n’est point question de créature ou d’esprit occulte dans Le Démon de Laplace mais bien d’un démon mathématicien. Cette entité que l’on nommera « Deus ex machina » suppose que tout serait déjà écrit et que le libre arbitre n’existerait pas puisque l’avenir serait déterminé par le passé. Les participants vont donc tenter d’échapper à cette mécanique quantique implacable, représentée par une maquette des lieux servant à de brillants effets de mise en scène, utilisant avec justesse la force évocatrice d’un hors-champ à vous glacer le sang.
Si de surcroît, mener une réflexion cohérente ne vous mènera qu’au tombeau… Se laisser guider par son instinct ou bien se laisser porter par des actes de nature irrationnelle pourraient-ils mettre en branle les rouages de cette machinerie infernale ? L’intérêt du film sera donc à géométrie variable, tant il se résume au mobile du tueur, soit mettre la théorie en pratique pour prouver son efficacité absolue.

Le Démon de Laplace pourra néanmoins heurter les plus incrédules avec sa monolithique reine de fer aussi gracieuse qu’une armoire à glace, dont on pourrait facilement entraver le chemin en se barricadant (ce que feront d’ailleurs maladroitement les survivants). La rigueur stylistique à l’œuvre ne saurait être entravé par ces quelques fils narratifs nécessaire (le rembobinage et l’avancement de la cassette visant à conditionner les futurs agissements des participants) à la bonne élaboration de ce piège particulièrement retors.
Rien de quoi vraiment ternir l’image d’un film tourné en noir et blanc alliant les technologies anciennes et modernes, appliquées à restituer l’ambiance macabre et oppressante des films d’épouvante des années 50. Les dialogues très inspirés évoquent le cinéma d’Alfred Hitchcock, tandis que l’ingéniosité des trucages permet d’occulter l’étroitesse du budget. Cette réussite artistique est à mettre au crédit de son réalisateur Giordano Giulivi, et ce grâce au talent et au dévouement de toute une équipe qui ne mettra pas moins de sept ans à accoucher de cette œuvre en toute indépendance.