[Critique] – Nemesis


Nemesis Affiche film

Réalisateur : Albert Pyun

Année de Sortie : 1992

Origine : États-Unis / Danemark

Genre : Actionner Cyberpunk

Durée : 1h35

Le Roy du Bis : 7/10
Thibaud Savignol : 6/10


Le John Woo des Bacs à Soldes


L’Enfer des Armes

Rappelons que le réalisateur hawaïen fut introduit par un certain Toshiro Mifune, avant de devenir l’assistant de Takao Saito (le directeur photo des films d’Akira Kurosawa), puis de se tourner vers le monde de la série B/bis. Stakhanoviste, Albert Pyun s’ennuyait très vite sur les plateaux de tournage, enchaînant les commandes et petites productions à un rythme métronomique, mettant en boîte ses films en l’espace de quelques jours seulement. Ces derniers, dotés d’un fort capital sympathie, se retrouvaient amputés de leur format cinémascope, recadrés sauvagement en 4/3. Les faibles moyens alloués l’obligeaient à recourir à de multiples subterfuges. Les nombreux champs-contrechamps permettaient par exemple de pallier aux conflits d’emploi du temps de ses acteurs, se faisant face sans jamais se croiser sur le tournage.

Nemesis Critique film

Volte/Face

Faute de pouvoir mettre en scène son histoire dans une mégalopole Babylonienne (L.A. ne sera jamais que survolée et mentionnée), le réalisateur propose plusieurs backgrounds aux styles totalement antinomiques : cadre crépusculaire, jungle, désert post-apocalyptique, urbanisme du siècle dernier et paysage de carte postale. Ces environnements se marient paradoxalement très bien au talent et au savoir-faire du chef opérateur. George Mooradian expérimente parfois différents filtres de couleurs pour tenter d’insuffler une atmosphère science-fictionnelle hors du temps, donnant à son film des airs de western futuriste. La quiétude de certaines séquences rompt avec la furie des affrontements, tendant vers une forme d’abstraction.

Pratique, les vieilles ruines sidérurgiques servaient de background post-apocalyptique idéal. Les cyborgs bardés de technologies tirent comme des Stormtroopers et font de cet environnement un véritable gruyère (Alex qui se dégage un passage en tirant à travers le sol d’un hôtel). Ils déforestent la jungle à grands coups de Shrapnel, explosant tout ce qui peut bien s’apparenter à des murs, des cheminées ou des éléments de décors destructibles, pour le plus grand bonheur des spectateurs.

Les gunfights sont particulièrement gores et nerveux. Les corps subissent des déflagrations et démembrements chirurgicaux, réduits à l’état de charpie électronique. Pendant qu’Albert Pyun tente de reproduire le cinéma de John Woo, Olivier Grunner s’improvise en Chow Yun-Fat des bacs à sable, avec une série d’acrobaties et de ballets aériens parvenant à faire oublier son affreuse coupe au mulet et son manque d’expressivité. Tim Thomerson ne change pas de fusil d’épaule, revêtu de son éternel défroque corporatiste (trench et lunettes), troquant le rôle du héros pour celui du parfait salaud.

Il serait tentant de voir en Nemesis une parabole grossière de la guerre du Vietnam où des agents du gouvernement se retrouvent à mener une guérilla dans un territoire hostile qu’ils ne maîtrisent pas et qui les mènera à leur perte. Les résistants se terrent dans un cadre naturel luxuriant les rapprochant de leur humanité, en opposition aux cités déshumanisées et à la mainmise des grandes corporations sur-équipées (hélicoptère, mitrailleuse portative, gadget futuriste). Bien qu’il souffre d’une narration elliptique parfois confuse, les artifices pyrotechniques, l’extraordinaire flow d’Olivier Grunner, et l’atmosphère envoûtante qui se dégage du film en font la pièce maîtresse de la filmographie d’Albert Pyun.

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Retour en haut
Optimized with PageSpeed Ninja