
Réalisateur : Albert Pyun
Année de Sortie : 1989
Origine : Etats-Unis
Genre : Mandales Post-Apocalyptique
Durée : 1h26
Le Roy du Bis : 6/10
La Peste Bubobelge
D’abord il y a eu la révolte des gilets jaunes, puis l’épidémie de covid-19 a renvoyé tout le monde à la maison. Les choses se sont alors tassées, et la population s’est alors remise à rêver à des lendemains meilleurs. Mais l’illusion n’a malheureusement été que de courte durée face aux nombreuses crises qui ont frappé notre société, économique, énergétique, écologique…
No Future
La Guerre que l’on pensait se dérouler loin de nos frontières nous a finalement rattrapé et quand il a semblé que les choses ne pouvaient pas empirer, ESC a sorti une édition remasterisée de Cyborg sur laquelle les cinéphiles se sont rués comme des morts de faim. Probablement parce que celui-ci porte la marque des grands films, de ceux qui divise la critique en deux camps bien distinct mais surtout parce qu’il possède ce cachet typiquement old school, ce grain de folie et ce petit supplément d’âme qui manque aux productions des plateformes de SVOD.
Dans ces temps troublés où tout n’est que désolation, cataclysme environnementaux, haine, conflit et misère, qu’il est bon de se replonger dans une salle pour voir un héros tenter d’entretenir le dernier espoir sur lequel repose le sort de l’humanité. Après tout, les années 80 étaient déjà le creuset des fantasmes de nombreux cinéastes à la suite du séminal Mad Max 2. Plusieurs générations se sont donc succédées pour proposer leur propre vision d’un monde post-apocalyptique. La plupart ont néanmoins souffert de la comparaison avec George Miller. Albert Pyun s’y est d’ailleurs essayé plus qu’à son tour (Omega Doom, Nemesis, Knights).
Rien ne prédisposait pourtant Cyborg à un tel plébiscite compte tenu de sa genèse particulièrement chaotique. La Cannon était alors en proie à de grandes difficultés financières à la suite de plusieurs échecs au box-office (Superman IV), et fut bientôt contrainte d’abandonner plusieurs projets de long-métrage en cours de pré-production, notamment Spider-man ainsi qu’une séquelle des Maîtres de l’univers à l’origine destinés à Albert Pyun. Les producteurs vont alors missionner le réalisateur hawaïen de leur livrer un script peu onéreux à produire, pouvant recycler tous les sets de costumes et accessoires investis à hauteur de deux millions. Son choix se portera sur un film post-apo, ce qui tombe bien puisque les déchets et les ruines industrielles étaient relativement bon marché à l’époque.

Cyborg ne nécessitera ainsi qu’une rallonge de 500 000 $ et n’aura eu pour ainsi dire aucun mal à se commercialiser grâce à la présence providentiel de Jean Claude Van Damme bien que Chuck Norris fût le premier choix du cinéaste. Le belge était alors dans tous les bons coups (Bloodsport, Kickboxer) et son surnom « JCVD» était surtout synonyme de succès pour Menahem Golan et Yoram Globus. L’acteur était-il néanmoins l’antidote pour sauver la Cannon de la banqueroute ? Rien n’est moins sûr. Et si le film a bien du mal à se défaire de sa réputation de nanar avec ses guerriers passant leur temps à brailler comme des fauves en s’infligeant des gros coups de savates dans les côtes, cela est bien à mettre au crédit de sa star qui en a assuré le montage avec son compère Sheldon Lettich.
La Castagne
Pourtant, il convient de rétablir certains faits, puisque Cyborg n’était pas encore prêt au moment de sa projection test, conditionnant le mauvais accueil critique du public. Ces premiers retours laissèrent toute la latitude à JCVD d’en faire un nouveau véhicule à sa gloire au grand dam de l’Hawaïen. En effet, Albert Pyun avait imaginé une toute autre histoire axé autour de la sauvegarde des technologies que son antagoniste voulait par dessus tout empêcher afin de ramener la civilisation à l’âge de pierre. Finalement l’intrigue tournera autour d’un antidote contre la peste que ce dernier cherchera à s’accaparer pour empêcher l’humanité de s’en prémunir et ainsi mieux asseoir sa domination.
Quelque soit la version du script, Fender n’est donc intéressé que par le chaos qu’il engendre et l’éternel loi du plus fort. Cela avait néanmoins plus de sens dans le premier jet, puisqu’une épidémie pourrait légitimement décimer le reste de l’humanité. Dès lors, il n’y aurai eu pour ainsi dire plus personne à soumettre ou à combattre. Les différents arcs narratifs développés autour des personnages seront également chamboulés dans la version finale. Seul subsiste la quête de vengeance du héros à la lueur d’un twist scénaristique Léonien. Albert Pyun aura néanmoins l’occasion d’en livrer un director’s cut en 2013 (Slinger) à partir du film et des rushs VHS qu’il lui restait sous la main.
Ce que Cyborg gagne donc en castagne et en séquence d’action, il le perd néanmoins sur l’atmosphère préalablement instauré par l’hawaïen. Ces choix de mises en scène n’était guère au goût du belge et donc par extension à ceux des producteurs, préférant se fier au jugement de leur nouvelle poule aux œufs d’or. Il serait d’ailleurs galvaudé de dire que mal leur en a pris tant celui-ci a été un succès au box office et dans les vidéosclubs. Mais le fait est que le film alterne aussi bien le meilleur (son atmosphère et sa direction artistique) que le pire (ses bruitages, et le cabotinage de ses acteurs), ce qui ne devrait donc pas de sitôt apaiser les tensions entre ses détracteurs et plus fidèles admirateurs.