
Réalisateur : Juan Piquer Simòn
Année de Sortie : 1990
Origine : États-Unis / Espagne
Genre : Monstres des Abysses
Durée : 1h23
Le Roy du Bis : 6/10
Sortie Blu-ray le 28 mai 2025 chez Le Chat qui Fume
La Voie de l’Eau
En cette fin des années 80, les studios ont des étoiles de mer plein les yeux. La sortie aussi attendue que redoutée du dernier bébé de James Cameron (Abyss) va pousser son ancien employeur Roger Corman mais aussi Luigi de Laurentiis (frère du nabab Dino De Laurentiis) à prendre la voie de l’eau. Cette course aux grands fonds devra vraisemblablement permettre au plus rapide (ou est-ce au plus lourd ?) de sortir des ornières pour rafler le trésor. Néanmoins, tous ne naviguent pas dans les mêmes eaux.
Sean Cunningham sera le premier à lancer les hostilités avec Deepstar Six. Cette sortie occasionnera quelques bisbilles face à James Cameron qui sera sévèrement ballotté au box-office avec Abyss. Sans surprise, Roger Corman boira la tasse avec son médiocre Lords of the Deep. Mais le pire reste encore à venir avec le naufrage du Leviathan de George Pan Cosmatos, qui en dépit d’une réputation de sympathique série B dûment acquise avec les années ne remboursera que la moitié de son budget. En parallèle de cet ambitieux projet, le producteur avait décidé de lâcher du lest et de laisser sa nièce Francesca mener sa propre barque avec une fraction de son budget.
The Rift sera donc le dernier à se mouiller avec un canevas scénaristique reprenant peu ou prou celui d’Aliens mais sous l’eau, et avec un casting principalement constitué de seconds couteaux (R.Lee Ermey, Ray Wise). Le film repose en grande partie sur un héros aussi charismatique qu’une huître (Jack Scalia) dont la popularité se situait alors à peu près entre la murène et le concombre de mer. Ce n’est que quelques années plus tard que l’acteur deviendra l’une des figures de proue de la PM Entertainment grâce à son petit minois (Dark Breed, The Silencers). Rien n’est alors fait pour rassurer le public, pas même son immonde affiche française (titré L’Abîme) ressemblant à un vieux documentaire du commandant Cousteau.

L’histoire est des plus convenues. Un sous-marin est envoyé par 40 brasses de fond afin d’en secourir un autre. L’ambiance à son bord y est tout bonnement exécrable entre Wick Hayes, l’inventeur du submersible qui n’y est pas en odeur de sainteté, et son capitaine (R.Lee Ermey le sergent instructeur tyrannique de Full Metal Jacket), un bidasse pète-sec avec une balayette dans le cul. Le signal de la boîte noire va alors mener tout l’équipage vers une fosse océanique de laquelle va émerger un sac en plastique géant (ou était-ce un calamar ?) qui va les tirer vers l’abîme. Mais ce monstre n’est rien en comparaison de ce qui les attend dans une grotte abyssale servant de laboratoire d’expérimentations complotistes pour un grand génie du mal. Dès lors, il deviendra évident que l’un des passagers à bord n’est pas forcément celui qu’il prétend être et sert les ambitions d’une nébuleuse corporation.
Si la première partie du long-métrage s’intéresse avant tout aux dissensions et conflits de l’équipage, c’est vraiment à la moitié que The Rift commence à prendre du relief. Alternant entre des phases contemplatives et périples tempétueux, le réalisateur hispanique parvient à insuffler une atmosphère mystérieuse délectable dans la tradition des adaptations Verniennes (20 000 Lieues sous les mers, L’île Mystérieuse). Évidemment, Juan Piquer Simòn reste relativement limité dans ses effets souffrant manifestement du manque de moyens alloués à cette production. Néanmoins la magie opère dans ces étroits sphincters océaniques d’où surgissent des créatures abyssales et des poches volcaniques. Le public se laisse alors porter par les courants de ce divertissement sans grande prétention, malgré des décors et maquettes en toc comme ce sous-marin nucléaire tout droit sorti des années 70-80.
Puis, The Rift quitte sa pesanteur pour aborder une dernière partie euphorique et écarlate qu’on ne lui soupçonnait pas. Le cinéaste met alors les survivants aux prises d’une faune et d’une flore redoutable composées de mouches à merde gluantes, d’algues carnassières, d’étoiles de mer tentaculaires, fangeux et autres poiscailles extraordinaires que les survivants devront pulvériser dans des orgies d’explosions organiques, sanglantes et corrosives, suffisamment débridées pour pardonner une indolente première demi-heure et une fin des plus conventionnelles. Preuve que même face aux vents contraires d’une entreprise chaotique qui avait tout d’un sabordage dans les grandes largeurs, il est tout à fait permis d’espérer atteindre le cœur du nanarophile.
Merci pour cette belle découverte que je ne connaissais pas absolument pas. \o/