
Réalisateur : Danny Draven
Année de Sortie : 2001
Origine : États-Unis
Genre : Cyberpunk Post-Matrix
Durée : 1h12
Le Roy du Bis : 6/10
Le Bug de l’an 2001
Le succès de Matrix avait dû faire des émules du côté de Tempe Entertainment, nouveau vassal au service de l’ogre Charles Band, toujours en quête de nouveaux partenaires financiers depuis le divorce conclu avec la Paramount Pictures. Horrorvision est donc une variation bis opportuniste héritée de cette mouvance Cyberpunk, ayant connu sa consécration à la fin de la précédente décennie.
Mais t’es pas net Danny ?
Horrorvision oppose un webmaster accro aux sites porno à une entité technologique (Manifesto) naît de la haine et de l’abjection humaine. Cette intelligence artificielle a capturé sa copine et dupliqué son code ADN pour en faire une galette compressée. Toni devra donc intégrer un autre niveau de conscience pour tenter de la sauver. Dans sa quête, il sera aidé d’un guide spirituel campé par l’acteur fétiche de Bookwalter (James Black), un Morpheus qui ne dit pas son nom. Ensemble, les deux élus en tenues BDSM chercheront à endiguer ce programme malfaisant avant qu’il ne soit trop tard.
Malheureusement, lorsque l’intrigue commence à prendre de l’ampleur, le film arrive en bout de course, perdu au milieu de rien. Si certains maquillages et effets (ce cyborg officiant pour Manifesto au sein d’une puissante compagnie privée) sortent du lot, Danny Draven aura préféré troquer les environnements composites, et décors urbains techno-underground pour des bureaux, appartements, ainsi que le désert californien, forcément moins puissant sur le plan métaphorique…
Mais il en faut peu pour suggérer au public cette idée d’un futur dystopique où les technologies informatiques auraient pris le contrôle de nos vies. Dès l’introduction, le réalisateur affiche clairement ses intentions : une conversation instantanée par l’intermédiaire d’une webcam. Un webmaster libidineux affublé d’un tatouage «Cyberpunk» dans le dos. Un site interpasnet affichant un bandeau «Tyrell Corporation» (Blade Runner). Un virus spammant l’ordinateur d’une victime, et des câbles électriques s’agitant dans tous les sens, capturant les âmes des utilisateurs infortunés, afin de les digitaliser et les intégrer au programme dans une séquence évoquant le chef d’œuvre de Shinya Tsukamoto (Tetsuo).

S’il brandit des symboles assez puissants sur le plan thématique, Danny Draven le fait néanmoins avec la même finesse que cet enfant de 10 ans que l’on verra au détour d’un HLM miteux manipuler maladroitement les circuits et composants d’une plaque électronique. Horrorvision témoigne d’un tournage guérilla en DV transpirant le système D de tous ses pores. Le réalisateur a même été jusqu’à utiliser son propre appartement, tandis qu’un autre membre de l’équipe accepta de mettre en gage sa voiture. Le producteur J.R. Bookwalter semblait avoir bien drivé son protégé pour lui inculquer ses méthodes à l’emporte-pièce héritées de l’Ohio, tournant à l’économie de moyens en seulement 12 jours avec la bite et le couteau.
Système Z
Pas de ronds ? Pas de problème et surtout pas de demandes d’autorisations. Charles Band n’y verra absolument aucune objection tant que le film ne dépassera pas le budget alloué de 50 000 biftons. Horrorvision ne transcendera donc jamais son ambitieux postulat de départ malgré quelques bonnes idées à mettre à son actif, notamment son usage vicié qu’il fait de la technologie : le virus empoisonne les consciences, et capture les modèles dont les photos de charme se retrouvent en accès libre sur la toile. Ces dernières se retrouvent alors prisonnières de leur propre image, privées de leur identité et à la merci du programme. Les utilisateurs sont pervertis et perdent la raison, désinhibés par les possibilités que leur offre ce nouvel outil, générant alors une épidémie de tuerie qui ne sera malheureusement jamais visible du public.
En s’enfonçant volontairement dans une impasse scénaristique, Danny Draven ne sera jamais en mesure de suggérer le chaos civilisationnel que mentionnent ses deux protagonistes. Le réalisateur cherchera alors à orchestrer la confrontation tant attendue contre Manifesto, une créature bringuebalante et déglinguée, pastiche d’un Predator cybernétique à la gestuelle grippée. Malheureusement ce combat pachydermique ne suffira pas à sublimer les quelques ébauches thématiques esquissées par le scénario de J.R. Bookwalter et Scott Phillips, pas plus que sa petite bestiole carnassière (probablement inspirée du film Cronos) se déployant sous la forme d’une boule de pétanque.
Les concepteurs iront jusqu’à acheter le nom de domaine du film. Le lien (Horrorvision.com) dirigeait le spectateur sur l’ancien site de Tempe Video. Une idée marketing astucieuse mais mal fagotée. Deux ans plus tard, William Malone tentera à son tour de l’exploiter pour la campagne promotionnelle de son film d’horreur (Terreur.point.com). Frappé du sceau de la malédiction poursuivant les copycats du phénomène japonais d’Hideo Nakata (Ring), le long-métrage ne fera pas long feu dans la conscience populaire et finira comme son site internet, égaré dans les limbes du net.