
Réalisateur : Danny Boyle
Année de Sortie : 2025
Origine : États-Unis / Royaume-Uni
Genre : Infectés
Durée : 1h55
Thibaud Savignol : 8/10
Stand By Me
Suite au succès de 28 jours plus tard, une séquelle est rapidement mise en chantier. Engagé sur Sunshine, Danny Boyle cède sa place derrière la caméra au jeune cinéaste Juan Carlos Fresnadillo. Remarqué pour Intacto, il n’avait depuis officié que sur des publicités. Alex Garland (scénariste du premier volet) et Boyle deviennent producteur délégués, moins impliqués dans le projet. Cela n’empêchera pas le metteur en scène britannique de tourner lui-même l’intense séquence d’ouverture, qui voit une cellule familiale imploser suite à la propagation de l’infection par l’un des membres. Long-métrage sympathique, au casting solide (Robert carlyle, Imogen Poots, Jeremy Renner), 28 semaines plus tard n’a pas laissé de trace indélébile, si ce n’est sa séquence de l’hélicoptère, outrageusement gore.
Retour en terres maudites
Largement rentable en 2007, 28 semaines plus tard ne devait pas marquer la fin de la saga. Mais 28 mois plus tard, bien qu’officiellement annoncé, tardera à pointer le bout de son nez, avant de basculer dans un «development hell». Début de décennie, le projet ressors des limbes, et malgré des difficultés qui subsistent, il parvient à trouver le chemin des salles obscures en ce mois de juin. On s’étonne d’ailleurs du peu de communication fait autour de ce retour. Mais surtout, il marque le début d’une nouvelle trilogie, dont le deuxième opus, réalisé par la prometteuse Nia DaCosta, a déjà été tourné et arrivera en 2026. Quant au troisième, il sera mis en chantier en fonction de leur succès. Car l’on parle tout de même d’un film à 60 millions de dollars, loin des 10 millions du film originel. Que vaut donc cette suite (pas) tant attendue ?

28 ans après les événements du premier opus, le virus a été éradiqué d’Europe. Mais le Royaume-Uni, irrécupérable, s’est transformé en zone de quarantaine à ciel ouvert. On suit une petite communauté de survivants installés sur l’île de Lindisfarne, proche de l’Écosse, protégée par les aléas de la marée, un unique sentier permettant d’accéder à l’îlot. Tandis que Jamie emmène son fils adolescent Spike sur le continent pour une initiation face aux infectés, sa mère atteinte d’un mal inconnu passe ses journées alitées. Soupçonnant son père d’attendre le dernier souffle de sa femme, et ayant entendu parler d’un soit-disant médecin dans les terres, Spike embarque sa mère pour une odyssée salvatrice, parsemée de dangers.
Lors de son premier teaser le film a tout de même fait parler de lui ; pour son zombie rachitique, mais davantage pour son tournage intégral à l’iPhone 15 Pro. Les cinéastes et autres vidéastes en herbe peuvent immédiatement calmer leurs ardeurs. Si l’objet est bien la caméra principale du film, il faudrait être terriblement naïf pour penser qu’il soit utilisé à nu, comme vendu en magasin. Une batterie d’accessoires en tout genre (objectifs, stabilisateurs, filtres) ont été ajouté pour garantir un rendu cinématographique. Même si le résultat n’est pas toujours frappant, plusieurs passages offrent ce rendu si particulier, proches des tentatives à la caméra DV du premier opus. Le père Danny Boyle reste un expérimentateur hors-pair, jamais rassasié.
À presque 70 balais, le réalisateur de la cérémonie des Jeux Olympiques londoniens de 2012 a toujours autant la niaque. Son filmage est agressif, cherchant constamment à proposer des angles bizarroïdes, décalés, pour illustrer un monde à la dérive. Ce côté punk ne l’a pas quitté, nous gratifiant de séquences rentre-dedans qu’on espérait plus, où la caméra virevolte sèchement lors des exécutions d’infectés, à l’image de fatalities bien corsés. Les affrontements avec ces derniers se révèlent d’ailleurs bien plus violents qu’en 2002 : le sang gicle à flot, et la présence d’un nouvel ennemi surpuissant (l’Alpha, un infecté supérieur à la moyenne) nous gratifie d’arrachages de têtes à mains nues des plus barbares.

La quête du héros
Depuis 28 jours plus tard, le genre du post-apo à base d’infectés à grandement infusé le cinéma, mais surtout le jeu vidéo. L’exceptionnel diptyque The Last of Us est passé par là, notamment son second opus, sommet de narration vidéoludique d’une complexité dingue, qui en a laissé plus d’un le cœur en miette et le cerveau en surchauffe. On retrouve ici cette sempiternelle communauté humaine qui réussit à tenir grâce à son fonctionnement en vase clos, mais dont l’éclosion d’un secret viendra mettre à mal leur tranquillité. Si les confrontations avec des hordes d’infectés restent d’une jouissance cathartique indéniable (après toutes ces années d’errance ils sont désormais entièrement nus, encore un geste fort de la part de Boyle), il serait injuste de réduire cette séquelle à un pur défouloir de marketeux nostalgiques.
Garland et Boyle vont à l’encontre de l’horreur moderne. Après un départ canon, ils s’accrochent à des enjeux plus minimalistes, d’écorchés vifs, transformant un récit de survive en aventure initiatique. Délaissant rapidement le mâle alpha testostéroné traditionnel (impeccable Aron Taylor-Jonhson), c’est pour mieux s’attacher à ce gosse de 13 ans qui balade sa mère malade en pleine zone mortelle, avec comme seul but de trouver le remède à son virus à elle. A travers épreuves et rencontres il finira par grandir, par choix ou par obligation, face à l’absurdité de la vie et de la mort.
Grâce à une écriture qui envoie valser le tout venant horrifique, fonctionnant par ruptures de ton surprenantes, aussi bien humoristiques que philosophiques, le duo propose un voyage à nul autre pareil. Ils prennent le risque de s’aliéner une partie du public venue chercher sa dose de zombies sprinteurs et de survivants qui se foutent sur la gueule. Pas de chance pour eux, la proposition se situe à l’opposée des attentes, jusqu’à un dénouement d’une émotion rare dans le genre, rappelant l’émouvante relation mère-fille de Dark Water, par son habilité à mélanger le sang aux larmes. Et l’épilogue complètement siphonné du bulbe nous intrigue au plus haut point pour la suite de la saga. Vivement 2026 !