[Critique] – Ultimate Game


Ultimate Game affiche film

Réalisateur : Mark Neveldine et Brian Taylor

Année de Sortie : 2009

Origine : États-Unis

Genre : Jeu Vidéo IRL

Durée : 1h35

Thibaud Savignol : 6/10


Fortnite sous acide


Le cinéma de Neveldine et Taylor ne laisse pas indifférent. Si vous appréciez la duologie Hyper Tension et sa mise en scène déjà très vidéoludique, vous pouvez continuer la lecture de cet article et inscrire Ultimate Game sur votre liste des plaisirs coupables à visionner prochainement. Ceux qui en revanche étaient déjà allergiques aux cabrioles et inepties de Jason Statham peuvent passer leur chemin.

Les jeux vidéo tuent

Gonflés par le petit succès de leurs réalisations précédentes, les deux réalisateurs décident de monter un projet plus ambitieux. Après après avoir mis en scène deux scénarios qui tiennent sur une feuille de PQ (le héros doit être stimuler en permanence sous risque de mourir), cette fois le script se veut davantage travaillé et à même de séduire une plus large audience. Pas de chance, il constitue sans doute le gros point noir du film.

Se déroulant dans un futur proche, le très riche et très mégalo Ken Castle vient de lancer Society, un jeu vidéo intégré au monde réel, où vous pouvez être soit aux manettes, soit le personnage joué en échange d’argent. Les excès ne tardent pas à pointer le bout de leur nez, car vous pouvez absolument tout faire, si ce n’est tuer son prochain. Chacun y trouve son compte, entre ceux qui vivent par procuration et commentent les exactions souhaitées, et ceux désirant vivre une vie à cent à l’heure. Pour étendre les limites du jeu de départ, l’émission Slayers est lancée, où des condamnés à morts s’affrontent dans des arènes, dirigés une fois encore par des joueurs derrière leur écran. Si l’un survit à trente affrontements, il obtient une grâce. Dans cette univers, Kable (on repassera pour la subtilité) doit encore remporter trois combats pour retrouver sa liberté, grâce aux talents du jeune Simon qui le contrôle.

Pitch de départ raccord avec une époque de plus en plus habitée par le jeu vidéo, en extrapolant notamment le concept de Second Life, qui défraya la chronique dans les années 2000 avec ses joueurs obnubilés par leur avatar virtuel. Dans cette logique, Ultimate Game pousse les potards à fond, les joueurs n’étant que des allumés ou pervers notoires retranchés derrière leur écran. Mis à part Simon, qui n’est tout de même pas insensible aux gains de sa nouvelle notoriété (les paires de nichons défilent à longueur de journée), le reste du casting oscille entre allumés du bulbe, vieux pervers et un obèse morbide filmé avec une complaisance assez crasse.

Ultimate Game Critique Film Cyberpunk

Ode à la bourrinitude

Couplé à l’ultra-violence d’une société qui ne cherche que le divertissement le plus scandaleux possible, la dénonciation voulu par le duo ne passe pas inaperçu. Mais malgré la volonté de tout dézinguer premier degré, certaines nuances auraient peut-être méritées d’exister plutôt que de tirer à boulet rouge sur toute la communauté de joueurs.

Le long-métrage cite aussi bien Rollerball que Running Man, modernisant ces jeux du cirque comme catharsis d’une violence sociétale contenue au quotidien. L’intention d’une vulgarité frontale, d’une absence de filtre et d’excès graphiques en tout genre est louable, mais n’est pas Verhoeven qui veut. Il manque sûrement un point de vue et une distance pour transformer le sérieux papal d’une œuvre premier degré en brûlot grinçant et noir (Showgirls, Starship Troopers).

Le scénario invoquera forcément, à l’image de Demolition Man, un groupe de hackeurs prêts à faire péter le système, qui viendront épauler le héros pour récupérer sa famille et se venger du grand méchant. Malgré la subtilité d’un 36 tonnes et une ligne narrative cousue de fil blanc, le long-métrage constitue un plaisir régressif bien trop rare aujourd’hui. Le style de Neveldine et Taylor tourne à plein régime, surtout dans sa première heure, délivrant son lot de séquences survitaminées et jouissives au possible. Au son du Sweet Dreams de Marylin Manson ou du beaufissime Bad Touch de Bloodhound Gang, les deux américains composent des séquences hallucinantes de liberté, de trivialité, comme de purs shoots avant tout sensitifs.

On retrouve cette mise en scène ultra-percutante (leurs making of sont souvent fous, avec des plans obtenus en roller ou en moto), où la caméra se meut dans tous les sens, se retourne sur-elle même, fonce à toute berzingue jusqu’à coller aux visages des interprètes. Le tout porté par un montage redoutable, qui sait quand laisser respirer le filmage, ou au contraire décupler son impact via un style très très cut. C’est direct, rentre dedans comme pas permis, bas du front et pas très bien écrit, mais pour peu que vous soyez sensible aux charmes de cette mise en scène cocaïnée, vous passerez sans aucun doute un bon moment. Et ça, c’est déjà pas mal.

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