[Critique] – Virtual Revolution


Virtual Revolution affiche film

Réalisateur : Guy-Roger Duvert

Année de Sortie : 2016

Origine : États-Unis / France

Genre : Quête du Réel

Durée : 1h32

Thibaud Savignol : 3/10


Espoirs déçus


Sortie nationale le 16 octobre 2016, sur un parc hallucinant de … 4 salles. Voilà à quoi en était encore réduit le cinéma de genre il y a une dizaine d’années en France. Les choses ont pas mal bougé depuis, grâce à un intérêt renouvelé pour le violent, l’étrange et le bizarre. Peu importe si certains journalistes autrefois vindicatifs ont depuis retourné leur veste, ou si des réalisateurs s’en emparent davantage pour y proposer une lecture sociétale un brin pompeuse. Peut-être que cet opportunisme s’effondrera un jour, mais en tant que défenseurs en ces pages de ce cinéma à la marge, on ne peut que se réjouir face à autant de nouvelles propositions.

Relocalisation

Mais durant la décennie précédente, il était encore difficile d’imposer ce genre de visions aux producteurs et exploitants frileux. Remarqué pour son court-métrage précédent Cassandra, entre le trip médiéval et le jeu de rôle grandeur nature, Guy-Roger Duvert enfile ici les casquettes de producteur, scénariste, réalisateur et compositeur pour son premier long-métrage. Cherchant avant tout des fonds en France, il devra compléter son budget aux States, faute de susciter un réel intérêt dans nos contrées. Et les fameuses 4 salles qui ont daigné projeter le résultat final, c’est Guy-Roger lui même qui est allé les démarcher.

Virtual Revolution Critique film Cyberpunk

En effet, en 2047 la plus grande partie de la population est accaparée par les mondes virtuels. Un arc redoutablement pragmatique, qui permet de justifier l’absence d’une cité surpeuplée. On fait comme on peut avec son budget. En parallèle, Nash, un hybride qui partage son temps entre réel et virtuel, est chargé de traquer des terroristes qui menacent le système. Pas d’androïdes en quête d’émancipation ici, mais une odeur de néo-noir et un complot ourdi dans l’ombre.

Spoon Runner

Si les effets visuels ne déméritent pas grâce à l’équivalent du budget cantine sur Avatar, difficile de fermer les yeux sur la suite du métrage, qui rate à peu près tout ce qu’il entreprend. Louable est l’intention de marier cyberpunk pur et dur à une réflexion sur les univers virtuels, mais le scénario se prend rapidement les pieds dans le tapis. D’une trame en apparence simple, et justement prétexte à proposer une vision futuriste singulière, le récit complexifie la moindre péripétie, jusqu’à rendre le tout inepte. La réalisation, notamment côté «online», affiche une identité très fan-fiction, malheureusement assez cheap et dépourvue d’ambition (les innombrables champs-contrechamps).

Quant aux acteurs, ils font ce qu’ils peuvent, sûrement pas aider par les épuisantes tartines de répliques. On arrive ainsi à l’énorme point noir du film, ses dialogues. Quasiment l’intégralité du texte vire à la sur-explication. Tout est surligné en permanence, chaque phrase cherchant à expliciter l’univers mis en place, à justifier les actions des personnages ou à légitimer les ramifications du récit. L’effet pervers, c’est qu’au lieu d’éclaircir les zones d’ombre, le procédé rend l’ensemble davantage illisible, voire indigeste.

Le résultat final apparaît extrêmement bavard. On peut estimer qu’une grosse partie de l’argent rassemblée a été attribuée aux effets visuels et costumes, devant alors composer avec un casting de seconde zone et peu de temps alloué au développement du script. Cette réplique où Nash interrompt son interlocuteur, lui reprochant son long monologue, n’en apparaît que plus savoureuse, presque ironique sur l’œuvre elle-même.

Virtual Revolution se rattrape in extremis par son final d’une noirceur assez surprenante, presque désenchantée, maltraitant sans ménagement son protagoniste. Un sursaut pertinent, notamment dans le traitement de ses thématiques (le film flirtait avec le discours anti-virtuel dans son premier acte), politisées bien qu’un peu timides (le système entretient le monde virtuel pour dépenser moins par citoyen en terme de droits sociaux), mais qui survient bien trop tard après une heure et demie de projection compliquée. On louera éternellement ce genre de prise de risque et de proposition personnelle, trop rare par chez nous. Mais cela n’empêche pas pour autant d’avoir eu les yeux plus gros que le ventre.

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