
Réalisateur : Andrzej Bartkowiak
Année de Sortie : 2005
Origine : États-Unis
Genre : Enfer et Gros Flingues
Durée : 1h44
Le Roy du Bis : 3/10
Thibaud Savignol : 3/10
Mars Attacks
Avant que la geekosphère ne s’empare des grandes majors (Jon Favreau, JJ Abrams, David S Goyer, etc.) Hollywood faisait déjà les yeux doux aux gamers. L’explosion des ventes de jeux et de consoles ont rapidement ouvert aux producteurs un nouvel eldorado dès le début du millénaire. Tomb Raider, Alone in the Dark, House of the Dead, Resident Evil… Malheureusement, l’enfer des bacs à soldes est pavé de ces mauvaises adaptations vidéoludiques. Doom, sorti peu de temps après la résurrection de la franchise, ne faisait pas exception malgré son casting de premier ordre destiné au gyrobroyeur (Dwayne Johnson, Karl Urban, Rosamund Pike, Richard Brake).
Evil Game
Doom c’est donc l’adaptation officielle du jeu vidéo éponyme d’ID Software, ce FPS ultra violent affublé d’une sinistre réputation depuis la tragique fusillade de Columbine (les deux tueurs étaient des joueurs invétérés de Doom). Ce film sorti en 2005 tire son inspiration du troisième épisode de la franchise, paru à peine un an plus tôt. Malgré son gameplay old school, Doom 3 proposait une mise en scène horrifique absolument terrifiante. Seul contre tous, le joueur devait tenter d’empêcher les forces du mal d’envahir la Terre avec un arsenal d’armes bien fourni (tronçonneuse, fusil plasma, lance-roquette, sulfateuse..). Mais l’obscurité, le décor labyrinthique, les artifices et le sound design finissaient souvent par avoir raison des âmes les plus sensibles.
La saga d’ID Software n’a jamais été vraiment réputée pour faire dans la sobriété : Tirer d’abord, réfléchir après. Des cartes d’accès pour ouvrir des portes. Des vagues ennemies en rafale. “Les jeux vidéo, c’est comme un porno. On s’attend à une histoire, mais ce n’est pas vraiment important” déclarait d’ailleurs John Carmack. Doom 3 avait néanmoins le mérite de proposer un background assez solide avec son storytelling (le centre de recherche l’UAC, la propagande corporatiste, et les nombreux rapports d’incidents).

L’excavation d’anciennes tablettes et d’artefacts démoniaques provoquaient l’ouverture d’un portail vers une autre dimension. Tout le jeu baignait dans une atmosphère apocalyptique (les murs recouverts de sang, les monticules de cadavres, les pentagrammes dessinés au sol), isolant au maximum le joueur qui ne savait plus à quel saint se vouer face aux différents cas de possessions et forces se déchaînant à travers la station. Et seuls les gamers les plus endurcis étaient capables d’entreprendre cette descente aux enfers.
Déchaîner les Enfers
Dans Doom, une escouade de marines est envoyée faire le ménage sur Mars à la suite d’une expérience scientifique ayant mal tourné. À l’instar d’Aliens, les héros sont de vrais durs à cuirs. Ils n’ont peur de rien, sont sur-équipés mais finiront tous (sauf un) par se faire déchiqueter par d’abominables créatures. Si le film reprend bien l’idée de la téléportation quantique, le réalisateur évacue néanmoins les pentagrammes et iconographies religieuses pour une approche beaucoup plus aseptisée. Il est donc moins question d’exploiter la part d’ombre des individus possédés, et encore moins d’ouvrir les portes vers l’enfer, que d’orchestrer un jeu de massacre bien bourrin sans le point de vue immersif et le côté ludique.
Contrairement à Event Horizon qui mettait l’emphase sur son ambiance horrifique et infernale, son mysticisme et ses mutilations corporelles extrêmes, Doom privilégie les longues déambulations à travers des décors sombres et génériques (chiottes, laboratoire, égout et couloirs). Les séquences de cache-cache, les états de sièges et fusillades ne permettent jamais de combler la vacuité de son atmosphère cloisonnée, en l’absence d’une véritable tension. Et ce n’est pas le petit minois de Rosamund Pike et les excès psychotiques de The Rock qui parviendront à sortir le spectateur de sa torpeur malgré l’utilisation du fameux BFG (le putain de gros flingue !).
Faute de flanquer une véritable frousse au spectateur, Andrzej Bartkowiak rend les armes et cède alors rapidement à l’action décérébré. Ça tire, et ça se fight dans un octogone électrifié sur fond de métal industriel ultra conventionnel sans jamais faire preuve d’un soupçon de subversion ou de créativité. Plus riche en testostérone qu’en hémoglobine, Doom ne parvient jamais à restituer le climat d’insécurité ambiant et le gameplay ultra nerveux du jeu. Certes, son petit tour de train fantôme en plan séquence, filmé à la première personne (le money shot du film) fait encore sensation 20 ans après, mais révèle également tout de son absolue artificialité. Uwe Boll n’aurait peut-être pas fait pire.