[Critique] – Horror Star


The Horror Star Affiche film

Réalisateur : Norman Thaddeus Vane

Année de Sortie : 1983

Origine : États-Unis

Genre : Vampire-Zombie Vénère

Durée : 1h35

Le Roy du Bis : 7,5/10


Toujours vivant, Toujours Debout


Uncut Shouldn’t Play with Dead Movies

Le distributeur résiste encore à l’envahisseur félin (Le Chat qui fume), à l’ombre du géant Shadowz, aux coups de butoir de l’imposant Elephant Films, et à la marche impériale d’ESC dans un marché devenu impitoyable et anthropophage. En réalité, ce n’est pas la première fois que Romuald Falleau et Patrice Carmona proposent des films disons, plus «estimables» dans leur catalogue de distribution (Fatal frames, Il Gatto Dagli Occhi Di Giada, Il Mostro, Escalofrio). C’est qu’il en faut aussi pour tous les goûts. Les deux quinquagénaires ont donc décidé d’exhumer l’un des slashers les plus mésestimés des années 80.

Les deux Orléanais sont donc à l’initiative de cette superbe édition mediabook remasterisée qu’ils aimeraient vendre comme leur produit star, avec un superbe menu interactif itou, itou. «Sa place est dans un musée !» comme dirait l’autre. À travers ce livret informatif, le duo nous raconte différentes anecdotes autour du film, de la personnalité haute en couleur de son réalisateur : ses frasques sexuelles, ses concours de beuverie, sa bagarre avec James Cameron et sa tentative de chantage avec Tony Curtis sur le tournage de Club Life. Ce recueil constitue un témoignage passionnant sur l’état des lieux d’un genre et d’une époque, passant en revue l’âge d’or des vidéoclubs et de SVP, l’historique du festival d’Avoriaz et ses sélections disparates, rendant un vibrant hommage à l’ensemble de la distribution.

The Horror Star critique film

Conrad Ragzoff une ex-gloire déchue, se retrouve à tourner dans d’horribles publicités pour payer sa villa et son futur mausolée. Passant de vie à trépas, ses fans les plus ardents décident de lui rendre un dernier hommage en dérobant son cadavre pour festoyer à ses côtés. Face au caractère licencieux et morbide de cette démarche, le défunt au caractère tempétueux va alors revenir d’entre les morts pour livrer sa dernière interprétation, la plus sanglante et brutale. L’intrigue du film est tirée d’un authentique fait divers qui aurait éclaboussé la jet society hollywoodienne de l’époque. Errol Flynn accompagné de plusieurs autres acteurs aurait chapardé le corps de John Barrymore afin d’organiser une soirée mondaine en sa compagnie.

Vu d’un œil extérieur, nous pourrions suspecter que le duo d’éditeurs a certainement vu dans le sort réservé à cet interprète le miroir d’un destin funeste. Traversant une terrible crise existentielle, Conrad Ragzoff se retrouve à l’orée de sa sortie de scène définitive, bientôt remplacé par une jeune génération fougueuse et toute permise (Luca Bercovici, Jeffrey Combs) ne reculant devant aucun sacrilège pour porter leur star et idéaux aux nues. Cette vengeance d’outre-tombe est d’une certaine manière, le dernier combat et cri rageur d’un acteur sur le retour doublé d’un conflit intergénérationnel. 

Week-end chez Conrad

Sorti peut-être trop tôt, ou bien trop tard pour être apprécié à sa juste valeur, Horror Star était un film lucide sur son temps, lié au devoir de transmission entre deux générations, l’une portée par le cinéma d’épouvante-horreur et l’autre par le slasher. Norman Thaddeus Vane pose un regard attendrissant, empli de mélancolie et de romantisme pour ce genre évanescent avec lequel il a grandi. Franc-tireur, le cinéaste n’hésite pas à tirer à balles réelles sur la petite oligarchie élitiste du cinéma, mais également sur son public de fanatiques érigeant leurs idoles en totem de culte. Alors que les touristes se prenaient en photographie avec les reproductions en résine du T-800 et de Rocky au sein des restaurants Planet Hollywood, les admirateurs de Conrad Ragzoff en feront autant de sa dépouille, et plus si affinités… 

À cette occasion Ferdy Mayne fut recruté en lieu et place de Christopher Lee (beaucoup trop cher) pour jouer les comte Dracula de pacotille. Sa présence était une évidence après avoir tourné dans Le Bal des Vampires de Roman Polanski ainsi qu’une production Hammer (The Vampire Lovers de Roy Ward Baker). Pédant et hautain, le comédien s’en donne à cœur joie, affichant un calme olympien, le teint livide, le regard magnétique et le rictus figé, comme un animal empaillé. Ce dernier joue à faire le mort avec son public pour tenter de lui coller la plus grande frayeur de sa vie, débitant ses épitaphes face-caméra («Je suis parti dans les Ténèbres. Puis j’ai traversé des flammes. Ensuite je suis revenu. Tu m’as fait revenir de l’enfer !»), châtiant les mauvaises langues, coupant les têtes, cramant ses fans et foudroyant ses victimes de son terrible fiel. 

The Horror Star critique film

L’horreur atmosphérique tire toute sa puissance d’évocation de la mise en scène de Norman Thaddeus Vane et de la photographie expressionniste de Joel King, imposant des dizaines de prises de vues supplémentaires au désarroi du réalisateur craignant des dépassements de budget. L’ambiance sépulcrale sent les relents de caveau de la gothique Hammer. La caméra s’emballe (comme ce cercueil lévitant dans les airs), pris dans le mouvement de cette litanie nécrophile à mesure de la profanation des fêtards. Tout devient de plus en plus vaporeux à mesure que cette vengeance d’outre-tombe s’accomplit. Le cinéaste se fait le gardien du temple sacré, réemployant tous les poncifs éculés du genre à parfait escient (effet de brume, vue subjective, clair obscur, cri terrifiants, bruits inextricables, bad trip onirique) afin d’intégrer enfin cette «Horror Film Society» qu’il placarde opportunément à proximité de son mausolée. 

Dans l’exécution, il s’agit d’un slasher assez sommaire mais à l’approche bien plus classieuse que ses contemporains du bis américain. Horror Star s’adresse donc principalement aux amateurs du genre, plaçant de nombreuses allusions à ses illustres prédécesseurs (Vincent Price, Bela Lugosi), comme autant d’éléments venant accroître la dimension méta-fictionnelle de l’œuvre. Prisonnière de son image, l’ex-gloire déchue cherchera ainsi à rester digne jusque dans sa sortie de scène définitive, s’offrant un dernier baroud d’honneur infernal. 

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