
Réalisateur : Silvia St. Croix
Année de Sortie : 2009
Origine : États-Unis
Genre : Pain D’Épices Tueur
Durée : 1h12
Le Roy du Bis : 8/10
Thibaud Savignol : 6/10
Un Cinématographe de génie
Quand un réalisateur ne daigne pas signer un film sous son vrai nom, ce n’est jamais bon signe. Gingerdead Man premier du nom proposait un argument de poids : celui de voir l’acteur Gary Busey se réincarner dans un pain d’épice carnassier. Mais en dépit d’un marketing tapageur et rentre dedans, le film ne reposait que sur les frêles épaules de sa créature et de son doubleur, qui balançait quelques répliques salaces à peine dignes d’une série de blagues Carambar. Quant aux mises à mort, celles-ci étaient bien peu inspirées et constituaient une bien maigre pitance.
Une suite bigger and louder
Cet échec relatif aura néanmoins permis à son producteur de créer une nouvelle saga «prolifique», ou du moins une mascotte pour la firme avec le bong tueur d’Evil Bong. Cette fois c’est William Butler qui met la main à la pâte. Le scénariste autrefois acteur pour quelques films du studio (Spellcaster, Ghoulies II) n’était alors pas à son coup d’essai dans la réalisation, après les thrillers horrifiques carcéraux que furent Madhouse et Furnace.
Il préférera néanmoins signer cette suite sous le pseudonyme de Silvia St Croix, de manière à conserver un faux anonymat comme cela se faisait souvent dans les années 80, pour éviter de se retrouver affublé d’une réputation de souillon. Raison de plus quand le spectacle délivré verse dans le mauvais goût absolu et l’humour pipi-caca.
Si on pouvait donc reprocher à Charles Band de faire dans la retenue, William Butler préfère se complaire dans une série de gags outranciers et un humour souvent graveleux. Le réalisateur va même plus loin et profite de ce vaste délirium pour faire preuve d’un esprit satirique et vulgaire. Il effectue une mise en abyme sur le fonctionnement des studios dans le monde de la série Bis/Z, afin de parodier le fétichisme exacerbé de son producteur pour les poupées. Dès l’introduction il met en scène en scène une galerie de marionnettes grossières, qui en sont déjà à leur neuvième itération : Chiasse au trésor, Vibro hanté, Herculator, BobMerlin, Hémoroïd et Crâne de merde.

Avec des noms pareils et des looks si hétéroclites, le niveau ne sera évidemment pas plus élevé que celui d’un caniveau. La suite des événements sera du même acabit avec cet acteur chauve et bedonnant qui débite un monologue absurde, interrompu par une éjaculation d’excrément sur le visage l’obligeant à regagner sa loge en envoyant chier toute l’équipe de production. Faute de moyens alloués à l’entreprise le réalisateur a préféré botter en touche le scénario sans intérêt du premier, qu’il avait pourtant écrit, et le réintroduit dans son générique avec l’aide d’un album de contes mal dégrossis qui pourrait avoir été imaginés par un véritable attardé mental.
Les coulisses du Z
L’approche est néanmoins la bonne, et permet d’apporter une dimension méta bienvenue, compte tenu de l’absurdité du concept et de son antagoniste. A dire vrai, le film aurait très bien pu se tenir sans l’intervention de sa créature, puisqu’on y suit le quotidien à cent à l’heure d’un petit producteur dont le studio «Cheatum» (une connotation assez lourde de sens issue de la contraction de Cheat et Shit, en référence aux trucages et films de merde produits à la chaîne) est en cours de redressement financier, si bien qu’il se voit contraint de demander à ses techniciens de faire du bénévolat.
On verra donc cette caricature de Charles Band batailler sur tous les fronts contre vents et marées : flatter l’ego d’une ex star revenue de tout pour le convaincre de faire une brève apparition dans l’une de ses productions, calmer les ardeurs de ses équipes avec son sourire Colgate et ses promesses qui n’engagent que ceux qui y croient, tout en essayant de faire bonne impression auprès d’un éclopé venu visiter l’univers de ses héros. Le réalisateur en profite pour dresser un portrait au vitriol de cette institution et des dérives que ce genre de système D peut engendrer de pire : divergences artistiques, conflits internes, harcèlement sexuel, promotion canapé, histoire de cul entre collègues, galères de tournage, difficulté à trouver des financements ou à démarcher de nouveaux clients.

Mauvais goût assumé
Il s’agit d’un kaléidoscope de farces et de situations stéréotypées toujours teintées d’un humour noir politiquement incorrect, comme ce réalisateur faisant croire à une serveuse qu’elle deviendra une grande actrice après lui avoir demander de lui tailler une pipe. Le Gingerdead Man va donc profiter du désordre ambiant pour revenir sur le devant de la scène et décimer toute l’équipe afin de parfaire un quotidien déjà marqué par son lot d’emmerdes.
Gingerdead Man 2 fait partie de ces suites qui parviennent sans mal à supplanter leur prédécesseur en adaptant la bonne vieille recette du «bigger and louder». Certaines situations cocasses ne dépareilleraient pas dans une production Troma, comme ce maquilleur gay violé avec un fer à friser. La scène pourra éventuellement froisser la sensibilité de la communauté LGBT face à la jouissance éprouvée par la victime, mais ce serait néanmoins occulter l’humour totalement délirant et potache qui s’en dégage.
Et il y a de quoi se fendre la gueule à écouter les complaintes d’un accessoiriste qui rechigne de devoir terminer sa carrière avec une main fourrée dans le derrière d’une marionnette, ou bien de voir ces vigoureuses fessées flanquées par des bonhommes en tenue de la NASA, sous le nez d’un David DeCoteau qui semble lassé de toutes ces conneries.
Et pour mieux enfoncer le clou, William Butler en profite également pour régler ses comptes avec son employeur, auquel il reproche indirectement de vouloir produire trop de films médiocres plutôt que de n’en produire qu’un seul de qualité. Tout le monde en prend pour son grade y compris les critiques, qu’il fustige d’intellectualiser beaucoup trop le cinéma et de ne pas savoir apprécier les films du studio à leur juste valeur. On ne pourra que lui donner raison face à cette démonstration, tant certains avis ne font que refléter la propre frustration de leurs auteurs qui ne seraient pas capable d’en faire autant. Pourquoi s’embêter à regarder un film si vous êtes par avance convaincu de le détester ? Il est plus facile de détruire que de créer, à méditer. Maudit sois-tu Demonwarrior13 !